Je vous remercie pour toutes vos remarques, qui nous font entrer directement dans le cœur du sujet. Nous voulons donner un cadre au dialogue social car celui-ci est la garantie d'une expression des travailleurs des plateformes et donne à ces derniers la possibilité d'influer sur leur environnement de travail. L'organisation du dialogue social doit prévoir des modalités permettant un équilibre entre les représentants des travailleurs et ceux des plateformes. Ces modalités doivent être définies de manière à assurer la juste représentation de chacun, l'ARPE s'assurant de la réalité de cet équilibre dans les discussions entre les différents acteurs.
Cette nouvelle brique s'ajoute aux différentes avancées sociales déjà évoquées – la « loi travail » de 2016, avec les avancées sur les accidents du travail et maladies professionnels, la formation et l'accompagnement dans la validation des acquis de l'expérience, puis la LOM, qui allait encore plus loin –, qui ont constitué un progrès très important pour les travailleurs indépendants des plateformes. Nous complétons ce dispositif en structurant et en équilibrant le dialogue social.
La position des quelques pays européens cités est loin d'être aussi simple que ce que vous en avez dit. Même s'ils créent le statut de salariat pour les travailleurs des plateformes, ces derniers ne bénéficient pas de tous les droits traditionnellement attachés à ce statut. Ces pays ont fait émerger une forme de tiers‑statut : ce n'est pas la voie choisie par la France, qui préfère une approche fondée sur la concertation, le travail commun et l'amélioration des conditions d'exercice. C'est véritablement par l'écoute des travailleurs que nous pourrons y arriver. Or, contrairement à une idée reçue, ces travailleurs ne cherchent pas, dans leur grande majorité, à être sous statut salarié : plus de 80 % d'entre eux ne souhaitent pas une requalification en salariat, et certaines plateformes ayant voulu salarier leurs travailleurs peinent à recruter. Il est important de garder cela à l'esprit.
Par ailleurs, les concertations sociales devront s'articuler avec l'actualité européenne concernant les lignes directrices au niveau du droit de la concurrence et la directive qui devrait intervenir dans les mois à venir. La concertation est du reste la méthode qui a prévalu dans l'élaboration des ordonnances. L'avancée sociale que celles-ci représentent fait relativement consensus, comme Jean-Yves Frouin et Bruno Mettling ont pu le constater lors des auditions menées dans le cadre de la rédaction de leurs rapports.
Enfin, il est important de rappeler que ce texte ne crée pas de présomption d'indépendance.