Notre débat, tous bords confondus, est caricatural de l'Assemblée : on fait tous des constats qui sont justes, sur le manque de médecins, les comportements conservateurs de certains syndicats ou la réplication du modèle social, mais on s'envoie des vérités là où il faudrait cultiver la modestie. Quelle impression un concitoyen ayant du mal à trouver un médecin peut‑il avoir de nos débats ?
Dans les années qui viennent, le nombre de médecins va mécaniquement diminuer car ceux qui partent à la retraite sont plus nombreux que ceux qui commencent d'exercer. De plus, comme les femmes sont plus nombreuses parmi les nouveaux médecins, le temps médical disponible sera moindre. Dans ce contexte de pénurie, la proposition de Thierry Benoit peut avoir du sens pour des médecins qui seront formés plus tard, mais elle ne sera pas opérante à court terme : ceux qui s'orientent maintenant choisiront plutôt la solution de facilité pour eux – je ne dis pas qu'elle est éthiquement défendable, mais c'est ce qui se passera.
Il faut se concentrer sur les quelques territoires qui s'en tirent. Dans ma commune de 1 000 habitants, on est passé d'un médecin, à trois et demi : on s'est débrouillé pour imaginer ce qui attirerait les médecins, pour économiser du temps, on les a fait travailler avec le CHU, qui ne savait pas travailler avec la médecine libérale auparavant... La solution ne sera pas unique, et la proposition de Thierry Benoit peut participer à la palette des possibles. Mais nous devons être beaucoup plus modérés dans nos propos, car là, on se fait plaisir, on s'envoie des scuds, mais on ne règle rien pour nos concitoyens.