En vous auditionnant, c'est en quelque sorte un grand témoin que nous entendons.
Votre livre ne révèle pas l'existence de la maltraitance envers les personnes âgées dans les EHPAD ; je songe aux ouvrages antérieurs Tu verras maman, tu seras bien de Jean Arcelin, ex‑directeur d'EHPAD, ou Le Scandale des EHPAD d'Hella Kherief, aide‑soignante. Mais cette dernière, qui reste confrontée à l'optimisation salariale dans les établissements – privés – où elle travaille, attribue l'effet de votre livre au fait que vous y parliez des riches : le fait que, même riche, on ne soit pas protégé, on ne bénéficie pas d'une prise en charge privilégiée, le fait qu'un hébergement de luxe ne mette pas à l'abri de la maltraitance ont énormément choqué. Ils s'expliquent par l'institutionnalisation du phénomène et sa systématisation par les groupes privés à but lucratif afin de s'enrichir par tous les moyens, y compris au détriment de l'humain.
Ce qui ressort de votre livre, c'est la peur : on produit de la culpabilité chez les gens pour les rendre complices et les empêcher de se mobiliser contre le système ; c'est effrayant quant à la nature humaine.
Vous dites au début de l'ouvrage que vous ne voyez aucune difficulté à ce que de grands groupes privés gagnent de l'argent dans le secteur de la prise en charge de la dépendance – qui reçoit de l'argent public. Compte tenu de votre enquête, maintenez‑vous cette position ? Le fond du problème n'est‑il pas d'accepter la visée lucrative de ces établissements et leur cotation en bourse ? Ne devrait‑on pas sanctuariser les secteurs qui concernent l'humain – enfance, santé, dépendance et grand âge ?