Intervention de Laurent Giovachini

Réunion du jeudi 14 janvier 2021 à 11h00
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Laurent Giovachini, président du comité « souveraineté et sécurité économique » du MEDEF, président de la fédération Syntec, directeur général adjoint de Sopra Steria :

Il est en effet envisageable d'aller plus avant, mais il conviendrait d'abord de bien exploiter les labels existants. Je pense par exemple à ceux des prestataires de détection d'incidents de sécurité (PDIS) ou de prestataires de réponse aux incidents de sécurité (PRIS). Ils donnent l'occasion de mettre en valeur des acteurs de confiance, pour l'essentiel français, notamment en raison de la réponse qu'ils apportent aux cyberattaques ou des audits de sécurité qu'ils mènent à titre préventif.

La cybersécurité forme la première brique de l'assise de la souveraineté numérique. C'est vraisemblablement dans ce domaine que nous sommes les moins démunis. À l'œuvre, la démarche de labellisation y porte ses fruits. Sans doute les enjeux de souveraineté numérique se posent-ils avec davantage d'acuité au-delà de ce socle de la cybersécurité.

L'un de nos interlocuteurs a proposé de distinguer entre souveraineté des données et souveraineté technologique. La distinction qu'il opère me convient. Néanmoins, quoique le premier type de souveraineté revête un caractère essentiel et dépasse les seuls aspects de cybersécurité, je ne crois pas que des acteurs français et européens aient perdu toute chance de s'imposer en matière de technologie et de souveraineté technologique.

Évidemment, en Europe, nous ne possédons ni GAFA ni BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi). Pourtant, notre écosystème de startups, d'entreprises de services numériques telles que Capgemini, Atos, Sopra Steria, d'éditeurs de logiciels comme Dassault Systèmes ou l'allemand SAP, d'hébergeurs à l'instar d'OVHcloud, de sociétés stratégiques particulièrement concernées par le numérique, par exemple Thales, porte les germes de champions susceptibles d'aider les États européens, non seulement à répondre au problème des cyberattaques et à préserver la souveraineté de leurs données, mais aussi à assurer une forme de souveraineté technologique dans le domaine numérique.

À l'échelon européen, nous sommes parvenus, quelques années en arrière, à réagir contre l'omniprésence du système américain de géopositionnement par satellites, le GPS. Fondé sur l'excellence spatiale française et européenne, le programme Galileo permet progressivement de n'en plus dépendre totalement.

Dans le domaine numérique, nous évoquions l'initiative Gaia-X. Citons celle que la Commission européenne vient de lancer en ce mois de janvier 2021, dénommée Hexa-X. Elle consiste en un projet de recherche dans le domaine des réseaux sans fil 6G, en partenariat avec l'entreprise finlandaise Nokia.

Au commencement de la téléphonie mobile, au début des années 1990, Français et Européens étions, avec la norme GSM, les premiers mondiaux. Nous avons ensuite, petit à petit, perdu notre avance. Nous voyons ce qu'il en est de nos jours avec la cinquième génération (5G) de standards pour la téléphonie mobile. En prenant le risque d'investir, l'Europe s'efforce désormais d'être présente, en 2030, au rendez-vous de la 6G.

Labelliser dans le domaine de la cybersécurité reste positif. Pourtant, il ne s'agit que d'une première étape. Elle est certes essentielle puisque les risques de cyberattaques s'amplifient à mesure que la société se numérise. Plus avant de la question de la protection et, surtout, de l'hébergement des données, ne nous estimons pas vaincus sur le plan de la souveraineté technologique.

Si personne ne niera qu'il nous faut continuer d'accéder aux technologies qui se développent en dehors de notre continent, ne nous interdisons pas de susciter l'émergence de nos propres protagonistes. Notre tissu industriel et de services nous autorise à fonder quelque espoir dans le succès de l'entreprise, au moins dans le domaine du B to B, le numérique pour l'industrie. Il est vrai que les plateformes chinoises et américaines paraissent pour l'heure solidement implantées dans celui de la relation entre professionnels et particuliers, ou « B to C » (business to consumer). Je demeure optimiste devant les initiatives françaises et européennes. Nous disposons des moyens de remonter la pente et la partie n'est pas perdue d'avance.

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