Intervention de Nicolas Brien

Réunion du jeudi 25 février 2021 à 11h00
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Nicolas Brien, directeur général de France Digitale :

Fareed Zakaria a publié un essai à la suite de la crise financière de 2008. Il y explique que le XXIème siècle sera le siècle des trois empires : américain, chinois et européen. Il avance que la seule manière pour l'empire européen de projeter sa puissance sera le droit. Les Européens ont cette capacité à se mettre d'accord à vingt-sept, puis à projeter sur le monde des normes qui ont déjà fait l'objet d'une forme de consensus. Je constate que c'est exactement ce qui s'est passé avec le Règlement général sur la protection des données (RGPD) : l'empire européen, car il est arrivé à un point de consensus à ce sujet, a exporté ses normes et ses valeurs à travers le droit. Nous n'allons évidemment pas exporter le RGPD en Chine, mais le Règlement a fait quelques incursions en Californie, et des pays tels que le Japon et le Brésil se sont alignés sur ce texte. Il s'agit de la projection de la puissance européenne à travers le droit, et en particulier le droit du numérique.

Nous essayons actuellement d'aligner un certain nombre d'États sur nos préoccupations environnementales à travers les accords de libre-échange. Nous devons également être en capacité d'aligner un certain nombre d'États sur nos préoccupations numériques et nos standards en matière de souveraineté numérique à travers les accords de libre-échange. C'est ce qui s'est passé lors des négociations de l'accord entre l'Union européenne et le Japon : le mandat des négociateurs mentionnait clairement le besoin de faire adopter le RGPD par le Japon. Cela constitue, à mon sens, une belle et habile manœuvre de souveraineté européenne : si le cadre normatif qui s'applique au marché japonais est semblable au cadre normatif européen, les sociétés européennes sont en capacité d'exporter leurs solutions technologiques à moindre coût.

Le droit constitue, selon moi, une approche assez défensive. Mais l'on peut, à travers les accords de libre-échange par exemple – et à la condition d'en confier le mandat à nos négociateurs –, en faire des instruments très offensifs.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.