Intervention de Hélène Coulonjou

Réunion du jeudi 4 mars 2021 à 9h30
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Hélène Coulonjou, directrice déléguée auprès du directeur des systèmes d'information de l'Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) :

J'abonde dans le sens des propos du Dr Laurent Treluyer. Pourquoi est-ce qu'un CHU investit-il autant de temps et d'argent dans un entrepôt de données de santé, et dans ses données de vie réelle en général ? Cela conditionne l'attractivité du CHU pour nos médecins et chercheurs, et donc l'amélioration de la prise en charge des patients. Dans un second temps, il s'agit d'améliorer la soutenabilité de tous ces dispositifs que nous créons autour des systèmes d'information.

Il faut faire fi de cette croyance selon laquelle nous sommes assis sur un tas d'or et que nous pouvons vendre les données brutes. Les laboratoires pharmaceutiques sont largement revenus de ce type d'expérience. La donnée brute n'a aucune valeur : elle n'a de valeur que qualifiée par l'expertise clinique et outillée par des algorithmes ou des instruments issus de la mathématique appliquée.

L'AP-HP a largement travaillé avec les acteurs industriels sur l'intelligence artificielle et la valorisation des données de santé, dans l'élaboration du contrat stratégique de filière des industries et technologies de santé. Cela a donné lieu à un travail assez intéressant. Les équipes qui gèrent la propriété intellectuelle en matière de recherche et les collaborations y ont travaillé. Nous sommes partis d'assez loin avec les industriels sur le sujet de savoir comment, pourquoi et de quelle manière valoriser la donnée de santé. Nous étions les seuls représentants publics hospitaliers. Parmi les acteurs publics, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) était également présent dans ce groupe sur l'intelligence artificielle. Nous sommes arrivés à des positions relativement conciliables. Nous avons conclu que nous pouvions tirer un parti mutuel de la valeur de cette donnée de santé. Ces débats sont complexes, et il est important qu'ils aient pu exister et qu'ils existent encore.

La collaboration avec les acteurs privés se fait de manière très concrète dans des projets de recherche et développement en santé qui sont largement fondés sur des données massives et des données de vie réelle. Le dernier et le plus probant de ces projets est le projet AI DReAM, dont le coût total s'élève à 55 millions d'euros et qui est financé par Bpifrance. Il réunit pour les hôpitaux l'AP-HP, Gustave Roussy, l'Institut Curie et l'hôpital Saint-Joseph à Paris. Il est piloté par GE Healthcare avec d'autres acteurs industriels. Ce projet travaille sur l'image avec cinq cas d'usage. Nous avons, dans ce projet, réussi à créer une infrastructure pour la donnée image à trois niveaux :

– les entrepôts de données au sein de chacun des établissements de santé, avec la possibilité pour l'établissement de continuer à travailler sur la donnée acquise et outillée, pour d'autres usages que ceux prévus par le projet ;

– une plateforme constituée par l'industriel GE Healthcare, qui produit de l'algorithme et qui procède, par exemple, à de l'automatisation de contouring d'images ;

– le dernier niveau consiste à verser au catalogue du Health Data Hub des jeux de données standardisés issus du projet – il s'agit d'un engagement pris envers Bpifrance. Ce type de valorisation est donc possible.

D'autres formes de valorisation sont également possibles : l'AP-HP a noué depuis plus de deux ans un partenariat avec la start-up française d'intelligence artificielle Owkin. Le partenariat est fondé sur l'apport mutuel. Owkin entraîne ses modèles sur des données de santé de l'AP-HP et à l'issue de cet entraînement, la valeur créée par ces modèles et par les produits logiciels qui en découlent est partagée selon un ratio 50-50. Ce type de modèle de valorisation existe dans le cadre de collaborations.

Nous travaillons enfin à l'idée de créer une offre de services qui permettrait de proposer des prestations, en particulier à l'industrie pharmaceutique, sur la base des trois piliers suivants : de la donnée de haute qualité, de l'expertise clinique et un environnement clinique adapté pour le calcul sur les données.

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