Intervention de Frédéric Precioso

Réunion du jeudi 15 avril 2021 à 12h10
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Frédéric Precioso, responsable scientifique « Intelligence artificielle » à l'agence nationale de la recherche (ANR) :

L'Europe est très active sur cette question de souveraineté européenne, en particulier autour du numérique et de l'IA. Elle se positionne comme une troisième voie par rapport à la Chine et aux États-Unis, avec une autre approche de la préservation de la confidentialité des données, de la vie privée. De ce point de vue, je pense que c'est une très bonne stratégie pour ne pas être en retard. En IA, en dehors de la Chine et des États-Unis, le Canada est un très bon concurrent qui se positionne sur les mêmes valeurs que l'Europe.

L'Europe met en place des infrastructures pour rester dans la course sur l'IA mais aussi sur la donnée, avec en particulier le projet Gaïa-X qui est une très importante action collective pour le partage des données au niveau européen et les supercalculateurs qui permettront de traiter ces données. En France, le supercalculateur Jean Zay opéré par le grand équipement national de calcul intensif (GENCI) est le deuxième supercalculateur en Europe.

Le choix de l'Europe est tout à fait pertinent pour se positionner sur un autre axe que la Chine et les États-Unis, ce qui nous permet de préserver la population européenne de certaines nuisances et certains défauts de ces technologies et, en même temps, de nous prémunir contre les concurrents qui ne joueraient pas le jeu. J'ai par exemple été membre du comité d'analyse des développements des dispositifs médicaux et de santé intégrant des technologies en IA, parmi les trente experts qui participaient à la création de règles de régulation et d'évaluation de ces dispositifs. C'est une façon de rester dans la course et de garantir que ce qui sera mis au service de nos concitoyens est conforme aux valeurs de l'Europe. Cette voie prise par l'Europe pour rester dans la course me paraît donc très efficace.

Lorsque vous voulez un système de reconnaissance faciale, vous pouvez refuser un modèle, si l'accord des millions de personnes utilisées pour construire le modèle ne vous est pas fourni avec le système, ce qui vous met à l'abri de solutions qui n'ont pas forcément respecté les valeurs que nous souhaitons défendre en Europe. De la même façon, dans le domaine médical, pouvoir refuser un système qui prédit la présence d'une maladie sans avoir obtenu l'accord des patients dont les données ont été utilisées pour construire l'algorithme, aussi pertinent soit-il, est une façon de se prémunir en Europe. C'est la voie choisie, en s'appuyant sur le Règlement général de protection des données (RGPD) pour mettre des régulations très strictes qui nous prémunissent dans la course et dans le type d'approche, dans les comportements d'utilisation de ces technologies.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.