S'agissant de l'hydrogène, le projet de train d'Alstom correspond à un usage pertinent. Il nous paraît important de rappeler, notamment dans le plan présenté il y a quelques mois par Nicolas Hulot, la hiérarchie des usages de l'hydrogène et leur maturité.
Aujourd'hui, il existe déjà des consommations importantes d'hydrogène dans l'industrie qui utilise de l'hydrogène fossile produit par vapocraqueur, par craquage de gaz et, donc, assez fortement émetteur de gaz à effet de serre. Un des usages les plus mûrs, et l'urgence, serait de remplacer cet hydrogène fossile par de l'hydrogène décarboné produit, par exemple, par de l'électricité renouvelable. C'est le premier gisement, parce qu'il s'agit déjà d'un usage mature. Chimiquement, c'est la même chose ; il s'agit finalement, côté production, de remplacer un produit par un autre. La seule question qui se pose est la question économique, notamment celle du prix du carbone à fixer pour atteindre l'équilibre financier.
Le deuxième usage, qui arrive juste après en termes de maturité, concerne les transports, notamment le transport lourd et certains transports mal adaptés à des batteries. Typiquement, il en existe des exemples dans le cadre de la mobilité fluviale mais aussi ferroviaire, s'agissant de lignes trop peu utilisées pour qu'il soit rentable de les électrifier complètement. Plusieurs projets sont engagés, dont des projets à batterie. Il me semble qu'une communication a encore été faite hier sur l'un d'entre eux. L'hydrogène, à condition qu'il soit propre, est tout à fait pertinent pour générer une propulsion électrique sur un segment de ligne sans caténaires. C'est une meilleure solution que d'utiliser un train au fioul, c'est donc un bon projet.
Différentes solutions peuvent être mises en concurrence : hydrogène ou batterie. Il reviendra aux constructeurs spécialistes du secteur de les tester et de faire des propositions. Pour notre part, nous nous y intéressons afin d'anticiper les quantités totales d'hydrogène qui seraient potentiellement produites à partir de l'électricité et les intégrer dans les prospectives électriques. Si les quantités peuvent être, au début, minoritaires, elles pourraient bien devenir significatives à un horizon à moyen terme. De plus, un tel dispositif présenterait l'avantage d'être aisément « pilotable » à des moments intéressants dans le système électrique.
En revanche, ce qui est bien moins mûr aujourd'hui, et pourtant parfois évoqué en premier quand on parle de l'hydrogène à plus long terme – il importe donc de bien préciser qu'il s'agit d'un usage plus lointain –, c'est l'hydrogène utilisé pour répondre à des besoins de flexibilité du système électrique, pour du stockage intersaisonnier d'énergie, en convertissant par exemple les excédents d'électricité estivaux en hydrogène, puis en méthane, afin de les réutiliser en hiver pour produire de l'électricité. En fait, cette solution n'interviendrait qu'à un horizon bien plus lointain et n'émergerait que si nous avions des taux de renouvelables variables dans le système électrique dépassant les 80 %. Or, nous en sommes loin.
Mais, pour ce qui est de la mobilité, l'usage de l'hydrogène serait très adapté.
S'agissant des budgets de l'énergie, je ne sais pas quelle est la bonne unité entre budgets publics ou privés. Aujourd'hui, pour un certain nombre d'acteurs de l'énergie, dans les pays développés qui n'ont pas de problème massif d'accès à l'énergie et dont les consommations sont déjà importantes, les perspectives sont celles d'une relative stabilité, voire d'une baisse des consommations énergétiques. Chacun cherche à se positionner comme un acteur de l'efficacité énergétique et à proposer un service pour mieux consommer l'énergie. C'est une réorientation importante de l'ensemble des groupes industriels.
Budgétairement parlant, il existe plusieurs dispositifs. Les C2E, sur lesquels vous vous interrogez, représentent aujourd'hui plusieurs points de pourcentage au sein des factures d'énergie. Nous pourrions refaire les calculs plus précisément mais, dans certains cas, le poids des C2E répercuté sur le consommateur représente de l'ordre de 6 % à 7 % de la facture d'énergie, pourcentage qui est amené à augmenter.
Pour évoquer un sujet très spécifique relatif à l'électricité, le mouvement à la hausse de janvier dernier des tarifs réglementés de l'électricité est quasiment exclusivement imputable aux certificats d'économie d'énergie. En relatif, je précise bien qu'il ne s'agit pas de l'intégralité du poids des tarifs d'électricité, mais de l'intégralité de la hausse qui était quasiment due aux C2E.
Deux questions ont été posées sur les pistes à explorer concernant les C2E.
Tout d'abord, comme je l'ai dit, une concertation longue et profonde sur les différents dispositifs serait sans doute nécessaire. Mais on peut d'ores et déjà critiquer le manque de visibilité et de transparence du dispositif. Je vous ai donné des estimations mais, en fait, savoir combien valent les C2E aujourd'hui et quel est exactement leur poids se révèle compliqué, et ce n'est pas bien partagé. Il manque un indice des prix transparent, régulier et rapide sur le poids des C2E. Car savoir comment varient les cours donne une idée de la tension sur le marché et de la tension a priori pour atteindre les objectifs en fin de période. Cela, nous ne l'avons pas, bien que nous le demandions depuis un an. C'est la croix et la bannière pour introduire dans les registres administratifs des C2E les modifications, a priori relativement simples, qui le permettraient.
Ensuite, de nombreuses autres questions se posent. Pour n'en citer qu'une, je parlerai des programmes. Pour le dire rapidement, dans les C2E, vous pouvez avoir des fiches standards, des opérations spécifiques dans l'industrie ou des programmes, qui ne sont pas nécessairement directement de l'économie d'énergie, mais dont les effets indirects génèrent des économies d'énergie. Il peut s'agir de programmes d'information ou de sensibilisation. Les certificats sont délivrés en fonction du financement de ces programmes. Aujourd'hui, ce dispositif est géré au cas par cas, à très courte échéance, avec une visibilité insuffisante sur la part globale de volume allouée aux programmes et sur la façon de les lancer, car ce sont des opérations qui sont longues à être mises en place et l'on découvre tardivement le retour des propositions des professionnels. Il reste donc beaucoup à faire en la matière.
Enfin, pour préciser ce que j'appelais le suramortissement des véhicules électriques pour les entreprises, il existe des dispositifs, notamment comptables, au titre de l'amortissement accéléré qui est étendu aujourd'hui à toutes les mobilités propres pour les entreprises. Mais il existe un dispositif supplémentaire de suramortissement qui n'est, pour l'instant, valable que pour du gaz naturel véhicule et du biodiesel. C'est un manque d'incitation et de neutralité technologique entre les moyens de mobilité propres auxquels peuvent recourir les entreprises. Nous souhaiterions que ces dispositions soient étendues aux achats de véhicules électriques.