Intervention de Damien Siess

Réunion du jeudi 27 septembre 2018 à 9h00
Mission d'information relative aux freins à la transition énergétique

Damien Siess, directeur de la stratégie et de la prospective de l'Union française de l'électricité (UFE) :

Concernant le secteur maritime, je ne suis pas à même de vous répondre puisqu'il s'agit d'un segment où, assez naturellement, l'électrique n'est pas le mieux placé. Nous regardons par curiosité. Je pense que des acteurs de l'hydrogène, spécifiquement ceux du gaz naturel, pourraient, plus que moi, vous dire quelles sont les perspectives. Des solutions existent sans doute.

Pour ce qui est de la notion de foisonnement ou de la complémentarité des solutions, il importe d'avoir les idées claires. Dans les transports, nous allons passer d'un système « tout-pétrole » pour tous les moyens de transport, partout et tout le temps, à un système pouvant offrir plusieurs énergies. Pour autant, je ne pense pas qu'il soit réaliste de penser qu'il existerait un foisonnement de solutions pour chaque segment de transport. En fait, sur chaque segment, une solution sera majoritaire parce que plus adaptée.

Ensuite, effectivement, des effets industriels d'infrastructures empêcheront que tout soit développé en même temps. Il faut, je pense, rester en lien étroit avec les constructeurs pour voir sur quoi ils misent. S'agissant de la mobilité individuelle, pour la voiture, a priori, ce sera plutôt l'électrique. On peut se faire plaisir en disant qu'il existe plein d'autres solutions mais, aujourd'hui, la grande majorité des constructeurs parie sur l'électrique. Cela peut d'ailleurs ne pas concerner seulement la batterie. Cela peut nécessiter des compléments, des range extenders, pour avoir des rayons d'action plus importants. L'hydrogène est aussi envisageable mais, aujourd'hui, personne ne parie sur le gaz, et le seul acteur à miser sur l'hydrogène, c'est Toyota. L'immense majorité des constructeurs pensent à l'électrique.

Pour les bus, a priori, ce sera aussi l'électrique. Il existe aujourd'hui autant de bus électriques dans la ville de Shenzhen qu'en France, et les distances parcourues sont tout à fait compatibles avec le mode électrique.

Les transports lourds longue distance sont typiquement le domaine où l'usage du gaz peut être pertinent. Quant aux niches captives, du type camion-benne, il semblerait pertinent d'utiliser l'hydrogène.

Mais, en dépit de la vision selon laquelle il existerait pléthore de solutions, il ne faut pas penser que plusieurs solutions seront proposées sur chaque segment. Ce serait dramatique en termes de coûts, notamment d'infrastructure, et ce ne serait pas réaliste. Même industriellement, pour les constructeurs, une fois qu'une solution émerge, les volumes augmentent et les coûts baissent du fait que la solution devient majoritaire.

En conclusion, comme je l'ai indiqué au début de mon audition, le premier frein à la transition énergétique, le premier retard concerne les aspects climatiques. Il faut donc insister sur les freins, même si d'autres objectifs de la loi de transition énergétique mériteraient d'être, chacun, étudiés. Mais il se trouve que nous nous sommes fixé la plupart des autres objectifs comme moyen d'en atteindre d'autres, que l'on peut tout à fait débattre de leur portée et les discuter. Le critère climatique est celui sur lequel nous sommes le plus en retard et qui s'impose à nous, celui sur lequel nous n'avons pas le choix. Nous ne sommes pas aujourd'hui le seul pays en retard par rapport à nos objectifs d'émissions de carbone, mais si chaque pays est en retard, l'emballement climatique s'accélérera. Nous en voyons régulièrement les effets. Or, quand on en voit les effets, c'est trop tard ! Quand on se plaint de la canicule, c'est déjà trop tard : elle est le fruit de l'accumulation d'énergie dans l'atmosphère depuis des dizaines d'années.

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