Intervention de Jacky Aignel

Réunion du jeudi 9 mai 2019 à 11h00
Mission d'information relative aux freins à la transition énergétique

Jacky Aignel, maire du Mené :

Monsieur le président, mesdames, messieurs, merci pour votre invitation. Je suis maire de la commune nouvelle du Mené, qui a regroupé sept petites collectivités, et qui compte 6 500 habitants sur 163 kilomètres carrés. C'est un territoire atypique, assez vaste mais peu peuplé. Laurent Gaudicheau, directeur général des services, présentera la partie administrative, puisqu'il a en charge le montage des dossiers, et je vais vous présenter ce que nous avons fait sur le territoire et notre volonté politique.

Notre développement, depuis cinquante ans, est le résultat d'une volonté du territoire, d'une volonté des habitants de « faire ensemble ». Si nous en sommes là aujourd'hui, sur un si petit territoire avec si peu de moyens, c'est grâce à la volonté des gens, des habitants et des élus.

Nous n'avons pas attendu ces dernières années pour envisager la transition énergétique. Nous y sommes engagés depuis 1995, et surtout depuis 1999 avec l'idée de construire une usine de méthanisation, l'usine de Géotexia, qui fonctionne. Nous nous trouvons dans une région très agricole, très agroalimentaire, donc avec beaucoup de déchets à traiter, et avec de nombreux paysans – dont je fais partie – qui sont accusés par nos amis côtiers d'apporter des algues vertes dans la Manche. C'est ainsi que les agriculteurs se sont mobilisés, avec des associations, et que cette volonté de transition énergétique a démarré chez nous en 1999. On n'a pas attendu que ça vienne d'en haut pour le faire. On s'est relevé les manches, comme on sait le faire au Menée depuis cinquante ans. Nous sommes un territoire pauvre, et si nous ne mettons pas la main à la pâte, il ne se passe pas grand-chose. Tous mes prédécesseurs et tous les gens qui sont engagés là-dedans peuvent être fiers du résultat. Aujourd'hui, nous possédons le premier outil de méthanisation en France, qui a mis – je rejoins Philippe Pichery sur la question des délais – plus de dix ans à aboutir.

Nous avons aussi de l'éolien participatif : ce sont 147 familles qui se sont investies dans ce parc participatif depuis 2011, et nous sommes en train de monter un deuxième parc.

La collectivité, avec ses bâtiments publics, a mis en place des chaufferies pour les sept anciennes communes. Nous avons cinq chaufferies qui chauffent des bâtiments publics mais aussi des bâtiments privés. Nous avons également du photovoltaïque. Même en Bretagne où, comme on dit plaisamment, il fait beau plusieurs fois par jour, on peut faire du photovoltaïque. La collectivité a aussi construit des maisons solaires dont le chauffage et l'eau chaude sont assurés par 20 m2 de maisons solaires. Voici donc la preuve que c'est possible. Aujourd'hui, nous avons un projet de station biogaz d'un type assez nouveau, sur une fosse à lisier qui permet de récupérer directement le biogaz à partir du méthane.

Il y a un potentiel énorme en Bretagne. On va épurer ce méthane, et puis on va faire tourner des véhicules : ceux de la collectivité mais aussi ceux de La Poste, avec laquelle nous avons un partenariat. La Poste est très intéressée par ce projet, et nous, La Poste nous intéresse parce que ce sont des gens qui font des circuits et un nombre régulier de kilomètres chaque semaine. C'est donc très intéressant aussi pour nous et pour le « business plan ». Ce sont nous, les collectivités et les agriculteurs, qui avons été le fer de lance de ces différents projets. Chez nous, l'associatif est très dynamique et les gens n'hésitent pas à s'engager.

Je laisserai Laurent parler des freins, mais selon moi – je rejoins Philippe Pichery – il faut absolument lâcher la bride aux territoires, qui savent de quoi ils ont besoin. Je comprends l'encadrement des crédits, je comprends l'encadrement des subventions, je comprends tout à fait qu'il y ait besoin de contrôle, mais, de grâce, lâchons la bride aux territoires ! Les besoins de mon territoire ne sont pas identiques à ceux des autres territoires. Nous, les élus, sommes bien placés, avec nos représentants, pour savoir de quoi nos territoires ont besoin.

On peut appeler cela décentralisation ou autrement, mais cette question est un des principaux freins à cette transition énergétique. Au niveau politique, il faut quand même définir une ligne, un fil rouge. Ensuite, on travaille dessus, on s'y tient et puis c'est tout. Il faut arrêter d'aller un coup à gauche, un coup à droite, car à force de zigzaguer on ne sait plus trop où on va. Il faut regarder en face et puis y aller. Si nous n'avions pas mis ce développement en place sur le territoire, nous serions aujourd'hui à la remorque pour ce qui est de la transition énergétique. Or, on en a énormément besoin parce que l'agriculture est en pleine transition, tout comme l'économie. Si l'on veut réussir demain une vraie transition énergétique, il va falloir se poser les bonnes questions. Si l'on continue à faire fonctionner notre économie comme aujourd'hui, jamais on n'y arrivera.

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