. Au niveau national, il convient d'agir en cohérence avec les ambitions européennes. Nos propositions au nombre de sept s'articulent autour de plusieurs axes.
Premièrement, améliorer la mise en œuvre des directives européennes, en évitant la surtransposition, qui conduit, au niveau local, au blocage de certains ouvrages de retenue d'eau. De même, s'agissant de la directive nitrate, la fixation dans les zones vulnérables de valeurs limites inférieures à celles prévues par la directive suscite l'incompréhension des agriculteurs. À cet égard, on retrouve les phénomènes pointés tout à l'heure par notre collègue Jean-Louis Bourlanges sur le caractère hétérogène de l'application de la réglementation européenne à cause du problème de surtransposition.
Deuxièmement, adapter les règles d'urbanismes aux dérèglements climatiques : il convient notamment d'instaurer l'obligation pour les collectivités territoriales de tester les conséquences de leur développement urbain sur la politique de l'eau, de l'approvisionnement à l'assainissement, sur le modèle du « water test » des Pays-Bas. La France peut utilement s'inspirer du modèle de certains pays du Nord de l'Europe en matière de gestion et de traitement des eaux pluviales. Pour lutter contre l'artificialisation des sols, il faut modifier les règles d'urbanisme, afin de favoriser une certaine densification et rendre à la nature les friches bétonnées. Il faut d'ailleurs bien expliquer ce concept de « densification », parce que beaucoup de nos chers concitoyens pensent tout de suite : « on ne veut pas de tours ! ». Or, la densification ce n'est pas forcément construire des tours.
Troisièmement, résoudre les conflits d'usage en améliorant la gouvernance : il convient notamment de développer les projets de territoire pour la gestion de l'eau, dans l'esprit du « Pacte pour repenser l'eau, dans la Ville » et des « Dix engagements pour que nos villes de demain restent vivables », élaborés par le comité de bassin Adour-Garonne présidé par l'ancien ministre Martin Malvy.
Quatrièmement, encourager les pratiques agricoles vertueuses, notamment sur les aires de captage. C'est une étape importante à laquelle tient à juste titre Jean-Claude Leclabart.
Cinquièmement, optimiser les financements européens liés à la gestion de l'eau par le Fonds européen de développement régional – FEDER –, qui sont sous-utilisés par les régions, comme l'indiquait d'ailleurs un récent rapport de la Commission des affaires européennes sur ce sujet.
Sixièmement, améliorer l'information du public en affichant, en plus des informations sur la qualité de l'eau, le prix de l'eau par litre, afin de sensibiliser le consommateur à la différence de prix entre l'eau du robinet et l'eau en bouteille. Nous avons fait des calculs tout à fait étonnants : la consommation d'eau en bouteille coûte entre 250 euros et 300 euros par personne contre quelques euros pour la consommation d'eau du robinet. À une époque où on parle beaucoup de pouvoir d'achat, il faut donc avoir conscience de ces écarts !
Septième recommandation : assouplir la réglementation sur la réutilisation des eaux usées traitées pour élargir ses usages (lavage des voiries, des voitures et des bateaux, de restauration de zones humides, de création de zones de loisirs, industrie…).
Pour conclure (même si j'aime répéter la formule de Gustave Flaubert, un autre grand Normand : « la bêtise, c'est de vouloir conclure »), je tiens à rappeler que l'eau est l'une des premières victimes du dérèglement climatique, mais sa capacité d'absorption du carbone en fait également l'une de nos armes les plus puissantes. C'est la raison pour laquelle il est urgent de la remettre en haut de l'agenda politique européen et national. Je vous dirais donc Madame la Présidente : « affaire à suivre ! ».