. Le combat doit se mener à la fois sur le front de la concurrence et de la consolidation. Consolidation car les paysages nationaux sont divers, entre la multitude des institutions bancaires allemandes ou italiennes et le secteur français, plus ramassé. La stabilité progresse mais la consolidation reste la priorité. Les pays ne sont pas toujours très volontaires sur les sujets de souveraineté financière, mais les crises sont souvent des moments opportuns pour se rassembler et avancer ensemble. La supervision doit être renforcée pour contribuer à cette consolidation, surtout dans les pays où ces difficultés persistent et qui reste supervisés par la banque centrale nationale. Il nous faut aussi aboutir sur l'achèvement du système de résolution et le MES pour disposer de réels filets de sécurité.
S'il y a un cas de défaillance, il faudra agir. Une flexibilité opérationnelle me semblait nécessaire mais les règles seront remises en place dans quelque temps, car il faut des ratios de fonds propres importants. Cette flexibilité était d'autant plus nécessaire, que les problèmes de rentabilité s'accroîtront avec la crise.
S'agissant des mesures concernant le soutien économique et les garanties, elles étaient nécessaires. Y aura-t-il une crise bancaire ? On le verra très vite. Selon les interlocuteurs que nous avons rencontrés, nous avons la chance de disposer des banques les plus solides de l'Union européenne. Il reste qu'il peut y avoir des défaillances bancaires en Europe. C'est la raison pour laquelle je parle de stress test.
S'agissant du durcissement des prêts accordés aux particuliers, notamment en matière de crédit immobilier, c'est un sujet qu'il faudra surveiller, car le secteur immobilier est un moteur fondamental de l'économie. Il ne faudrait pas avoir une crise immobilière, qui pourrait aussi se traduire par une crise bancaire.
Sur le plan politique, on voit bien que la crise a fait bouger les lignes entre ceux qui sont très frileux et ceux qui veulent avancer très vite. Il faut à la fois de la concurrence et favoriser une relance cohérente. Les évolutions politiques actuelles se reflètent dans le débat sur le secteur bancaire. Certains demanderont plus de souplesse, d'autres plus de coordination entre les pays. La crise va permettre d'avancer sur le sujet de l'Union bancaire, d'autant que c'est un projet qui était prévu de longue date.
Jean-Louis Bourlanges a évoqué le sujet du renforcement de la supervision des petites banques, notamment dans les pays où elles sont nombreuses, comme l'Italie ou l'Allemagne. Ce n'est d'ailleurs pas forcément le rôle de la BCE. La banque centrale italienne, dont nous avons rencontré certains représentants, a beaucoup amélioré son système de supervision, qui souffrait de nombreuses défaillances. S'agissant du MES, les Italiens critiquent certains aspects du mécanisme, mais la crise actuelle va peut-être permettre des progrès.
Par ailleurs, je suis absolument convaincu qu'il y aurait eu des risques majeurs de pertes, s'il n'y avait pas eu ce système. Si toutes les réglementations du secteur bancaire n'avaient pas été mises en place, on serait aujourd'hui en grande difficulté, car nous ne pouvons pas construire un plan de relance sans système bancaire solide. Le système bancaire a permis d'éviter une crise bancaire imminente.
Ensuite, quels sont les obstacles et les leviers de l'achèvement du marché bancaire ? De nombreux obstacles politiques peuvent être surmontés avec la crise car, pour la première fois, tous les pays ont été touchés. Les leviers sont principalement politiques. Il faut cibler quelques domaines : finaliser la supervision, aboutir sur les fonds de résolution. S'agissant de l'Union bancaire, comment peut-on garantir la présence des grands groupes dans les pays d'accueil, sans ponctionner la totalité de la rentabilité d'une banque ? Il faut trouver la solution technique au niveau européen, pour dépasser la logique entre pays d'accueil et pays d'origine des banques. Si nous avançons sur ces aspects techniques, l'Union bancaire pourra progresser beaucoup plus vite.