La crise que nous traversons n'a pas entamé l'ambition de l'Union européenne vers la neutralité carbone. Notre commission y souscrit pleinement, convaincue comme vous que l'Union doit se réinventer pour être plus verte, plus numérique, plus résiliente. Ces trois objectifs sont inséparables et doivent être envisagés de manière cohérente. Cela implique de s'entendre à 27 sur une définition de ce qu'est le verdissement. Nous ne devons pas nous résoudre à la décroissance au motif de la lutte contre le changement climatique. Cette lutte exige au contraire d'encourager les sauts technologiques qui permettront d'inventer un avenir meilleur et respectueux de la planète. L'Union européenne ne doit se priver d'aucune technologie, que ce soit en matière énergétique, en matière industrielle ou en matière agricole, pour atteindre les objectifs ambitieux qu'elle s'est assignés. C'est pourquoi nous sommes particulièrement inquiets que la Commission propose un verdissement de l'agriculture passant par une réduction de moitié de la surface agricole utile. Pourquoi ne pas recourir à d'autres moyens comme les nouvelles techniques de sélection variétale et les produits de biocontrôle ? Cela permettrait à la fois d'accompagner la transition écologique de l'agriculture en Europe et d'assurer notre souveraineté alimentaire. Ces deux impératifs vont de pair et l'un ne doit pas être sacrifié à l'autre.
De même, l'Union européenne doit rester attentive à soutenir les investissements qui amélioreront son autonomie énergétique tout en contribuant à la décarbonation de l'économie. À cet égard, le sort réservé à l'énergie nucléaire dans la taxonomie des investissements verts nous préoccupe. Nous restons aussi attentifs aux moyens que la Commission propose de réserver au projet de réacteur nucléaire ITER dans le futur cadre financier pluriannuel. Il est impératif, dans le respect des engagements pris, de consacrer à ITER les moyens adéquats pour assurer la poursuite de ce projet capable de créer pour l'avenir une source durable d'énergie sûre et respectueuse de l'environnement. Quelle est votre position à ce sujet ?
En outre, nous ne devons pas oublier que la responsabilité de la lutte contre le changement climatique est l'affaire de tous. L'Union européenne doit donc se doter d'instruments permettant d'en répartir la charge afin qu'elle ne pèse pas sur nos seules entreprises. Celles-ci ne pourront pas résister à la concurrence déloyale de compétiteurs qui ne seraient pas soumis aux mêmes exigences environnementales. Notre politique commerciale commune doit être optimisée en ce sens et les accords commerciaux doivent intégrer cet objectif. Nous soutenons aussi la mise en place d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières afin d'établir des règles du jeu égales pour tous. À cet égard, pouvez-vous nous préciser comment s'articule votre action avec celle du commissaire chargé de la politique commerciale ?
Le Sénat a récemment adopté un avis motivé s'inquiétant de la conformité du projet de loi européenne sur le climat au principe de subsidiarité. Même si nous souscrivons à l'objectif de neutralité climatique à l'horizon 2050, il nous semble que la Commission va trop loin en demandant à pouvoir définir par acte délégué la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La définition de cette trajectoire n'est pas un élément technique, ni mécanique, elle soulève des enjeux importants en termes économiques, sociaux, technologiques et industriels, ainsi que d'aménagement du territoire dans chacun des États membres. Aussi, définir la trajectoire vers la neutralité carbone à l'horizon 2050 revêt un caractère éminemment politique. Cette décision doit être pleinement acceptée par les États membres pour être mise en œuvre avec succès. Comment la Commission envisage-t-elle de prendre en compte cet avis motivé ?