Intervention de Valérie Hayer

Réunion du mercredi 14 octobre 2020 à 16h00
Commission des affaires européennes

Valérie Hayer, députée européenne :

À la faveur de la crise, un ensemble de changements de paradigmes sont à l'œuvre. L'agenda français, porté par le président Macron est devenu l'agenda européen, et la crise n'a fait qu'accélérer ce phénomène. Aujourd'hui, les problématiques du numérique et de l'environnement notamment, sont devenues centrales. Le bond en avant fait avec le lancement de cet emprunt est une étape historique dans la construction européenne, qui permettra sans doute de faire des progrès majeurs sur les ressources propres. Depuis 2018, le Parlement conditionne son soutien au cadre financier pluriannuel à des avancées sur les ressources propres, et à présent, autour de la table de négociation, on avance comme jamais on n'aurait pu l'espérer. L'accord interinstitutionnel est juridiquement contraignant. Par contre, et cela a été très discuté avec la présidence allemande, on ne peut avoir d'obligation de résultat et préjuger de la décision des parlements nationaux de ratifier la décision sur les ressources propres qu'il faudra modifier pour au fur et à mesure de la création de nouvelles ressources. Il a fallu en tenir compte dans les négociations, c'est pourquoi nous demandons une obligation de moyens avec la présidence allemande, avec des dates de proposition des mesures, de discussion au conseil, et des dates d'introduction des nouvelles ressources propres.

Quand on aborde la question des nouvelles ressources propres, il est de mon rôle de pousser le panier des ressources car certaines ressources propres prises indépendamment avantagent des pays et, en désavantagent d'autres : en s'appuyant sur différentes ressources propres, on a à la fois une meilleure prévisibilité sur les recettes attendues, et une meilleure acceptabilité par l'ensemble États membres. Il y a des approches nationales à prendre en compte, certaines délégations ne veulent pas avancer, certaines sont d'accord avec des ressources propres, opposées à d'autres, cela tous groupes politiques confondus.

Notre calendrier est organisé en trois étapes d'ici à 2026 : 2021, 2024 et 2026. Ces processus prennent du temps, nous avons privilégié ces étapes afin d'avoir une approche à la fois réaliste et ambitieuse. Négocier sur les ressources propres et faire ratifier la décision prend beaucoup de temps, nous avons raisonné en termes d'étapes pour éviter d'avoir à organiser un nouveau processus de ratification tous les six mois.

Quand on regarde les sondages, l'opinion publique est de notre côté sur l'ensemble des propositions de ressources propres, y compris dans certains États dont les délégations officielles ne les soutiennent pas : la taxation des géants du numérique, la protection de nos normes et de nos entreprises avec le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières et la taxe sur les transactions financières.

Les recettes ETS auraient dû dès le départ être attribuées au budget européen, le mécanisme a été institué au niveau européen. Les Nordiques ne sont pas de grands défenseurs des ressources propres, mais quand on parle des ressources « vertes », ils sont prêts à discuter. Le mécanisme d'ajustement aux frontières est peut-être la ressource qui ferait le plus largement consensus au niveau des États. Sur l'assiette commune consolidée de l'impôt sur les sociétés, il est vrai qu'elle est enlisée, mais c'est notre rôle de pousser ce sujet dans les négociations.

Je soutiens pleinement la taxe sur les transactions financières et cela fait partie des deux derniers sujets à trancher avec la présidence allemande concernant la date d'introduction et les modalités. Toutefois, cela fait dix ans que l'on n'aboutit pas sur cette question dans le cadre de la coopération renforcée. Il y a donc un principe de réalité qui nous dit que cela ne sera pas si simple et même avec une coopération renforcée, dès lors que l'on veut en faire une ressource propre, il faudra une décision qui nécessité l'unanimité des États membres. Or certains y sont farouchement opposés, notamment la Suède, qui a connu un échec avec son introduction à l'échelon national dans les années 1980. C'est l'illustration de la nécessité d'avancer ensemble. Pour obtenir un consensus, on sera très loin de la proposition de 2011 de la Commission.

Par rapport aux suites du discours de la Sorbonne, le Parlement est très mobilisé pour passer de l'unanimité à la majorité qualité, notamment pour les décisions sur les ressources propres.

Sur la conditionnalité « État de droit », au Parlement européen, nous avons dissocié les sujets pour aller le plus vite possible, mais certains États membres assument de ne pas ratifier au niveau national, et de retarder le plan de relance dans l'attente de ce qui ressortira des discussions au Parlement européen de la conditionnalité sur l'État de droit (dans un sens ou dans l'autre). On rejette la responsabilité sur le Parlement européen, mais le problème est selon nous à régler au niveau du Conseil.

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