Intervention de Jean-Louis Bourlanges

Réunion du mardi 8 décembre 2020 à 18h15
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bourlanges :

Le rapport qui vient de nous être présenté est excellent. Néanmoins, nous touchons là à des sujets qui soulignent les ambiguïtés fondamentales de l'Union européenne et qui expliquent assez largement pourquoi les meilleures intentions de l'Europe n'arrivent pas à remporter l'adhésion des concitoyens européens.

En réalité, comme la rapporteure l'a très excellemment expliqué, il s'agit de faire quelque chose que l'Union européenne n'a pas les moyens juridiques de mener à bien. On ne peut pas créer un salaire minimum européen pour deux raisons principales, l'une juridique, l'autre socio-économique. La première vient du fait que l'Union européenne n'a pas les compétences requises. Tout ce qui est contenu dans la proposition de la Commission vise en fait à créer un cadre, à encourager, à dire du bien, à saluer ce qui est fait, à en demander un peu plus, mais en réalité, tout ceci se fait sur un fond d'impuissance. Il faut dire que nous avons besoin d'une compétence claire concernant l'intervention de l'Union européenne en matière de politique salariale. Cette compétence pourrait être de plusieurs sortes, et pourrait notamment porter uniquement sur le fait d'éviter des écarts à la baisse par rapport aux bas salaires. Cela n'existe pas par faute de moyen juridique et le résultat final ne peut être que décevant.

Les raisons socio-économiques sont claires et ont été expliquées par la rapporteure. Nous avons d'un côté des États où il y a une compétence publique, comme le nôtre par exemple, où le salaire minimum est fixé par l'État, et d'autres où les salaires minimaux sont déterminés par convention collective et ne peuvent donc donner lieu à aucune préemption par une autorité publique, qu'elle soit nationale ou européenne. Tout ceci fait que nous sommes dans une situation très délicate au sujet de cette proposition de directive.

Personnellement, j'estime qu'un salaire minimum doit avoir pour objectif d'éviter des « trous dans la raquette », c'est-à-dire que par rapport à des gens normalement payés, il y ait des secteurs dans lesquels les gens ne soient pas défendus et se retrouvent avec des salaires de misère. La fixation d'un salaire minimum constitue donc une sorte de « voiture balai » qui évite qu'un certain nombre de catégories soient trop mal payées. Ce qu'il faut évidemment éviter, c'est un salaire minimum obligatoire qui soit d'un montant identique dans l'ensemble des pays. Compte tenu des avantages comparatifs et des coûts de production des uns et des autres, en augmentant massivement les salaires dans des pays dont l'économie serait en retard, on arriverait à des résultats absolument catastrophiques. Le salaire minimum doit être d'un montant différent selon les pays selon un écart satisfaisant avec le salaire médian.

Concrètement, quel est l'objectif visé par cette proposition, certes bien intentionnée, mais dont je n'arrive pas à très bien à comprendre en quoi elle va fondamentalement modifier la situation ?

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