. Je constate une forme de contradiction voire de paradoxe au niveau de l'Union européenne. D'un côté, une injonction à mettre en place une souveraineté budgétaire et financière européenne et donc se détacher des prélèvements sur les PIB des États membres. De l'autre une injonction, propre au dogme néo-libéral, à limiter au maximum les taxes et l'intervention dans l'économie.
Je constate également, cela s'inscrit dans cette idée de dogme néo-libéral, que les accords de libre-échange se multiplient depuis quelques années. Ils ont pour but de supprimer les droits de douane de l'Union européenne. Combien de milliards d'euros en moins dans le budget de l'Union alors qu'elle prétend dans le même temps rechercher des ressources ?
Pourtant, ces droits de douane seraient utiles pour constituer des ressources propres. Ils permettraient de faire fonctionner le budget européen et également d'inciter notre industrie européenne à se relancer. Les autres pays, par exemple la Chine et les États-Unis, protègent leurs industries.
En 1988, la contribution des États membres représentait moins de 11 % du budget de l'Union contre 28 % provenant des droits de douane. Aujourd'hui, la contribution des États membres finance 72 % du budget communautaire et elle est complétée à hauteur de 15 % par les droits de douane. Je pense que cette évolution est néfaste.
Le débat sur les ressources propres ne doit pas faire l'impasse sur les accords de libre-échange qui sont nuisibles pour l'économie – puisqu'ils représentent une perte de ressources – mais aussi pour l'écologie au regard des conséquences que le libre-échange implique.
Concernant la taxe sur les transactions financières, cela fait plusieurs années que nous ne parvenons pas à nous mettre d'accord. Elle est débattue depuis près d'une décennie sans résultats concrets. Au vu des priorités de l'Union européenne aujourd'hui, je ne pense pas qu'elle verra le jour.
Enfin, partant du constat qu'il est nécessaire d'investir davantage, notamment sur la transition écologique, la levée de nouveaux impôts ne suffira pas. Dans les circonstances exceptionnelles d'aujourd'hui et au vu des défis de demain, il semble essentiel de penser à des solutions hors des cadres habituels.
J'ai souvent exprimé l'impératif de l'annulation des dettes. C'est une solution, bien qu'elle ne soit pas si révolutionnaire : elle ne va pas à l'encontre des traités européens et elle présente un cadre opérationnel intéressant, comme le considèrent de plus en plus d'économistes.
Une autre solution, qui irait cette fois-ci à l'encontre des traités, est celle de la monétisation. Elle serait utile pour gérer la crise sanitaire et prévenir la crise climatique car elle permettrait d'engager des dépenses de grande ampleur sans accroître la dette. Pour autant, elle présente certains inconvénients : comme elle implique une révision des traités, elle doit être débattue dans les institutions de l'Union. Cependant, je crois que devant la situation exceptionnelle à laquelle nous sommes confrontés, il ne faut pas avoir peur de modifier radicalement les traités.