Nous nous réjouissons tous que le plan de relance européen puisse enfin se mettre en place. Ce plan est-il suffisant ? Il faut le prendre tel qu'il est. Il a été difficile de parvenir à un accord au Conseil européen. La ratification de la décision sur les ressources propres a mis en évidence, au Sénat, des lignes de fracture, des craintes vis-à-vis d'un saut fédéral qui serait opéré en catimini. Je ne crois donc pas à un plan européen complémentaire.
En revanche, je vois la tentation de contourner l'obstacle par un débat légitime sur les règles budgétaires européennes. Doit-on s'accrocher aujourd'hui aux fameux critères de Maastricht ou faut-il les assouplir pour permettre aux États d'investir plus dans des domaines stratégiques pour l'avenir afin que l'Europe ne soit pas irrémédiablement distancée par ses concurrents, au premier rang desquels les États-Unis et la Chine ? Le gouvernement français souhaite que ce débat ait lieu, notamment dans la perspective de la présidence française du Conseil de l'Union européenne au premier semestre 2022. Il est important, mais assurément pas simple à mener, car la cohésion de la zone euro est potentiellement en jeu. C'est un débat qui ne peut, à mon sens, être mené qu'en étant accompagné d'une doctrine budgétaire crédible et d'engagements sincères en matière de choix et de maîtrise des dépenses publiques. La France a parfois eu tendance à avoir des engagements flottants et à être plus prompte à dépenser qu'à réduire les dépenses publiques.
C'est un débat que nous devrons avoir d'abord dans nos parlements nationaux, car le consentement à l'impôt et le vote du budget sont nos prérogatives historiques. Aussi je souhaiterais connaître votre approche en la matière, vos conditions et vos lignes rouges éventuelles. Si ce débat prospère, nous devrons le mener avec rigueur et en prêtant une attention accrue à l'impact des mesures proposées. Je pense par exemple à la trajectoire pour atteindre l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050. Cet objectif est évidemment louable, mais faisons attention aux conséquences socio-économiques des décisions qu'il implique. La dynamique de dépenses publiques induite pourrait être très élevée, et ne peut se concevoir que dans une approche globale offensive de l'Union européenne pour faire prévaloir ses intérêts, en matière commerciale et industrielle en particulier. Pour toutes ces raisons, je pense que nous gagnerions à échanger de manière concrète entre nos commissions sur ces sujets, en partageant des analyses circonstanciées. Ce serait une contribution utile à l'approfondissement de la démocratie européenne que nous appelons de nos vœux.
Certains de nos collègues ayant dû nous quitter, je vais vous faire part de l'intervention qu'avait prévue mon collègue Alain Cadec, qui est en lien direct avec la transition écologique.
Très récemment, la ministre française de la transition écologique a qualifié les énergies renouvelables de vitales pour lutter contre le changement climatique et parvenir à la neutralité carbone. Par ses propos, elle a désigné comme prioritaire l'implantation d'éoliennes sur le territoire français afin de soutenir la stratégie de décarbonation du paysage énergétique français.
Le gouvernement français a en effet défini une trajectoire dans les prochaines années, la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui prévoit notamment le doublement des capacités de production d'électricité renouvelable d'ici 2028. Elle s'inscrit dans un contexte d'évolutions des modes de vie et des mobilités qui renforceront incontestablement nos besoins en électricité. L'industrie de demain, fondée sur l'exploitation et la maîtrise des données, sera par ailleurs fortement consommatrice d'électricité.
Je tiens à rappeler que la production électrique française est déjà quasiment décarbonée. Elle provient à 75 % du nucléaire et à 23 % des énergies renouvelables, essentiellement de barrages hydroélectriques. Pourtant, les énergies renouvelables, même si elles sont largement adoptées par nos concitoyens, suscitent de fortes réactions. Elles montrent certaines limites environnementales, technologiques et sociétales. Le seuil de saturation est d'ailleurs déjà atteint pour plusieurs catégories, comme l'éolien terrestre et offshore. Pourtant, l'éolien offshore français ne représente que 1 % de l'électricité provenant des énergies renouvelables. Actuellement en campagne électorale, je peux constater qu'il y a une fronde de plus en plus importante de nos concitoyens contre l'implantation d'éoliennes et ses conséquences sur nos paysages. Un animateur de télévision très attaché au patrimoine, Stéphane Bern, a rédigé une tribune, largement relayée dans les médias français, pour dénoncer cette invasion qui menace nos paysages et notre patrimoine. Nous sommes confrontés dans nos régions à des implantations de parcs éoliens offshore qui provoquent la colère des pêcheurs, des habitants et d'associations environnementales. Ces parcs sont censés être érigés à une quinzaine de kilomètres au large des côtes, souvent en dépit des réticences des maires soucieux de protéger la richesse écologique de leur territoire. Paradoxalement, les critères financiers priment sur la préservation des activités économiques et les critères environnementaux.
L'installation d'éoliennes nécessite des aires d'implantation importantes. Pour produire la même quantité d'électricité, une centrale nucléaire s'étend sur la surface de 5 000 hectares, contre 5 000 km² pour un parc éolien.
Il me paraît essentiel que chaque pays apporte ses propres solutions, en fonction de ses spécificités économiques et industrielles, pour atteindre l'objectif de neutralité carbone que l'Union européenne s'est fixé.