J'aimerais commencer par citer une anecdote : au sein de mon territoire, en Artois, il existe une maison de l'Europe. Le président avait sollicité le président de l'agglomération de l'Artois pour une aide financière, mais la présidente de la communauté d'agglomération a répondu que ce n'était pas dans les compétences de l'agglomération.
Nous attachons une très forte importance à la notion d'appartenance. j'ai moi-même réalisé un rapport sur Erasmus il y a deux ans, dans lequel je préconisais un élargissement du programme Erasmus aux étudiants en apprentissage, et aux plus jeunes dès l'école primaire. J'ai également publié un rapport sur le socle européen des droits sociaux, et je voulais interroger Mme Schnapper à ce sujet. Nous nous réjouissons que le gouvernement français ait intégré le concept d'appartenance au triptyque pour la présidence du Conseil. Dans un contexte de crise économique, sociale et sanitaire il est indispensable de renforcer le sentiment d'appartenance européen. Cela est d'autant plus vrai que l'Union européenne et ses États membres traversent aussi une crise politique. En témoignent le Brexit, les remises en cause de l'État de droit en Hongrie et en Pologne ainsi que l'abstention électorale de plus en plus alarmante, comme nous l'avons vu dimanche dernier. Face à ces défis, nous devons nous interroger en tant qu'Européens sur ce qui nous assemble. Au moment de la crise du Covid-19, notre modèle social s'est révélé être un fort élément fédérateur à l'échelle européenne qui nous distingue sur la scène mondiale.
Mme Schnapper, dans vos travaux vous constatez que la citoyenneté moderne et démocratique a toujours été pensée dans un cadre national. La citoyenneté européenne, supranationale, est donc une exception historique.
Si la mise en place de la citoyenneté de l'Union avec le traité de Maastricht constitue un succès historique, l'Europe peine à générer une véritable identité collective. Ce déficit en matière d'appartenance constitue un véritable frein à l'avancement de l'intégration européenne y compris en matière sociale.
Si le modèle social dans chacun des États membres reste très lié à l'histoire et à des perceptions nationales, la définition de normes et de droit sociaux communs peut donner plus de substance au sentiment d'appartenance européen. À titre d'exemple, la mise en place du socle européen des droits sociaux peut compléter de manière très concrète la Charte des droits fondamentaux de l'Union. Compte tenu de ces éléments, l'Europe sociale peut-elle être un levier pour renforcer le sentiment d'appartenance européen ? Quelles préconisations pouvez-vous nous donner pour renforcer l'identité européenne en nous appuyant sur la singularité européenne en matière sociale ?