Intervention de Clément Beaune

Réunion du mardi 29 juin 2021 à 17h15
Commission des affaires européennes

Clément Beaune, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes :

Je suis heureux de revenir devant vous pour exposer les résultats du dernier Conseil européen qui a eu lieu jeudi et vendredi derniers, après la réunion extraordinaire tenue fin mai. C'était le dernier Conseil européen sous présidence portugaise. Le Portugal passera dès demain le flambeau à la Slovénie pour six mois, avant la présidence française qui débutera le 1er janvier prochain.

Ce Conseil européen a été l'occasion d'aborder beaucoup de sujets. Vous l'avez évoqué, madame la présidente, la loi hongroise du 15 juin dernier s'est invitée à l'ordre du jour. Quel est le point commun de ces sujets ? Il me semble que c'est la fermeté européenne et le développement d'une réflexion stratégique. J'y reviendrai s'agissant de la Russie, sujet sur lequel nous avons beaucoup progressé sous l'influence de la France et du Président de la République au cours des derniers mois ; c'est aussi le cas pour la Turquie, j'y reviendrai également.

La question sanitaire a, de nouveau, été au centre des débats, même si nous sommes plus optimistes que lors des précédentes réunions du Conseil européen. En effet, partout en Europe, la situation s'améliore et la vaccination se développe rapidement. En définissant un cadre commun pour l'achat des vaccins, l'Union européenne a favorisé cette accélération et, même si ce point n'était pas à l'ordre du jour du Conseil, je vous informe qu'elle a signé d'autres contrats afin de nous prémunir à l'avenir de la menace des variants – le fameux variant Delta représentant désormais environ 20 % des cas en France et cette proportion étant mécaniquement amenée à augmenter, comme l'a indiqué le ministre de la santé ce matin. Or le vaccin est la seule protection face au variant.

Nous ne savons pas tout de cette pandémie. Il s'agit donc d'anticiper pour nous préparer le mieux possible et d'acquérir des doses de vaccin adaptées aux variants. C'est le sens des contrats que la Commission européenne a signés, en notre nom collectif : 1,8 milliard de doses de vaccins Pfizer et au moins 150 millions de doses supplémentaires du vaccin Moderna seront disponibles à compter de fin 2021. La présidente de la Commission a rappelé les exigences de l'Union européenne, inscrites dans ces nouveaux contrats : autant que la science le permet, les vaccins devront être efficaces contre les variants et les près de 300 composants des vaccins devront être produits en Europe. Des délais de livraison plus précis sont prévus, qui ne sont plus seulement trimestriels, mais mensuels. Cela améliorera le pilotage du dispositif, après les difficultés que nous avons connues notamment avec AstraZeneca. La campagne de vaccination avance bien puisqu'environ 60 % des adultes européens ont reçu au moins une dose de vaccin – la France est légèrement au-dessus de cette moyenne.

Nos débats ont donc été marqués par un optimisme vigilant. Dans la perspective de la saison estivale et touristique, le Président la République est intervenu concernant l'ouverture progressive des frontières internes à l'Europe et les déplacements. Le pass sanitaire européen constitue une avancée importante, même si la coordination a été difficile. Depuis début juin, un pass sanitaire est disponible en France. Il permet d'accéder à certains grands rassemblements avec un unique support, conforme au format technique européen. À partir du 1er juillet, notre pass devra donc être reconnu par tous les pays de l'Union européenne, même si certains d'entre eux ne sont pas encore prêts à délivrer le leur. Ainsi, un voyageur français souhaitant se rendre dans un autre pays de l'Union européenne pourra le faire grâce à son code de test ou de vaccination français. Ce n'est pas anecdotique ; un tel outil européen de circulation et de coordination est même essentiel pour ce deuxième été, malheureusement encore marqué – même si c'est un peu moins – par la covid-19.

Au cours de son intervention, le Président de la République a également tenu à souligner que nous nous en tiendrions à la liste des quatre vaccins autorisés par l'Agence européenne des médicaments (EMA) – Pfizer, BioEnTech, Moderna et Johnson & Johnson – pour la délivrance du certificat car nous avons élaboré une procédure commune et rigoureuse, destinée à créer la confiance. Il serait paradoxal d'expliquer aux Français que nous ne les autorisons pas à se faire vacciner avec certains vaccins non autorisés par l'EMA, puis de laisser entrer des touristes vaccinés avec ces mêmes vaccins.

Le Président de la République, comme la chancelière allemande, ont appelé à la prudence, à la rigueur et à la vigilance : la réouverture et la saison touristique sont importantes, mais cela ne justifie pas la précipitation, d'autant que le rebond lié au variant Delta illustre que nous ne sommes pas à l'abri de péripéties dangereuses. Trois pays européens reconnaissent, et ils en ont le droit, des vaccins non autorisés par l'EMA, mais reconnus par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) – il s'agit à l'heure actuelle uniquement du vaccin chinois –, pour l'entrée sur leur territoire. Ce n'est pas, et ce ne sera pas, notre cas. Nous avons appelé nos partenaires à s'en tenir à cette position de prudence, la plupart d'entre eux ont répondu positivement, notamment l'Allemagne.

Nous avons également évoqué la solidarité internationale. L'Europe est à l'avant-garde et, pour faire suite au précédent sommet européen, puis au sommet du G7, la solidarité internationale s'est accrue : un milliard de doses de vaccins seront données d'ici la fin de l'année et deux milliards d'ici 2022. La France a revu ses engagements à la hausse, le Président de la République ayant annoncé qu'elle donnerait au moins 60 millions de doses d'ici fin 2021.

L'Europe est le premier donateur de vaccins. J'insiste car on nous l'a reproché au début de la crise, au motif que nous ne gardions pas suffisamment de doses pour nous. Pourtant, nous avons réussi à accroître notre production – au mois de juin, l'Europe est le premier producteur mondial de vaccins –, tout en étant le principal donateur et le premier exportateur de vaccins. Le débat est légitime, mais il était de notre devoir et de notre intérêt d'agir ainsi.

La solidarité européenne a été fondamentale car elle nous a permis de ne pas avoir à faire face aux différences massives de vaccinations entre pays que l'on constate au niveau international, certains étant clairement laissés de côté – même si j'espère que c'est de moins en moins le cas. Sans cette solidarité, certains, en Europe, ne seraient pas vaccinés ou seraient à des taux de vaccination de 5 à 15 %, ce qui constituerait un problème sanitaire du fait de notre interdépendance.

Nous avons également fait un point sur la situation économique, intrinsèquement liée à la crise que nous vivons. La zone euro et son avenir ont fait l'objet d'une discussion rapide et prospective – sans prise de décision – qui a été l'occasion pour le Président de la République de rappeler notre attachement à la mise en œuvre rapide du plan de relance de 750 milliards d'euros, adopté il y a maintenant onze mois.

Nous avons franchi des étapes importantes au cours des dernières semaines. Ainsi, la première dette commune européenne, projet politique très important qui rappelle que nous avons tenu à organiser la sortie de crise ensemble, a rencontré un grand succès sur les marchés financiers – nous avons d'ores et déjà levé 20 milliards d'euros en juin. C'est un signe de confiance dans l'avenir de l'Union européenne. Les investisseurs ont proposé sept fois les montants demandés par l'Union, à un taux extrêmement compétitif se situant entre les taux d'intérêt français et allemand.

La validation des plans de relance avance bien, le plan français l'ayant été le 23 juin, veille du sommet européen. Cela permettra au ministère des finances, une fois la dernière étape franchie, de disposer des premiers 5 milliards d'euros début juillet. Cela a pris du temps mais, compte tenu des sommes en jeu, ce temps démocratique était nécessaire dans un club à vingt-sept pays. Ainsi votre assemblée a-t-elle examiné le dossier début février.

Nous avons aussi fait un point sur le dossier migratoire, très important alors que les flux, même s'ils restent modérés et n'atteignent pas les niveaux de 2015 ou 2016, ont augmenté au cours des dernières semaines – sans même évoquer l'épisode très spécifique entre le Maroc et l'Espagne. En Méditerranée centrale, les flux au départ de la Libye et la Tunisie à destination de l'Italie, ont repris. Nous devons donc négocier des accords estivaux afin de prendre en charge les bateaux récupérés en Méditerranée, mais également réfléchir à la répartition solidaire des migrants. La France et l'Allemagne ont largement assumé ce rôle au cours des deux dernières années, mais c'est un devoir collectif, de solidarité européenne. Il faut que chacun joue son rôle : les pays les plus proches des bateaux doivent accepter le débarquement des migrants, les autres pays doivent s'organiser pour les répartir et les prendre en charge. C'est normal, d'autant que certains d'entre eux ont vocation à demander l'asile.

Le débat, que l'Italie avait sollicité compte tenu de la situation que j'évoquais, a été très court et, au-delà de quelques engagements de principe, le président du Conseil italien a rapidement compris qu'il faudrait y revenir dans un format plus restreint au cours des prochains jours. En l'espèce, les ministres de l'intérieur de la France, de l'Allemagne et de l'Italie, entre autres, mènent des discussions intensives pour essayer de trouver les conditions d'un accord.

Plusieurs dossiers internationaux se sont invités au Conseil européen et ont occupé les chefs d'État et de gouvernement de longues heures jeudi. Un déjeuner de travail avec M. Guterres, récemment reconduit comme secrétaire général des Nations unies, a permis d'évoquer les principaux dossiers, dont le Sahel. Mais les chefs d'État et de gouvernement se sont surtout focalisés sur la Turquie et la Russie.

S'agissant de la relation entre l'Union européenne et la Turquie, le constat est mitigé, mais aussi partagé par les Européens, ce qui constitue une avancée même si des différences persistent dans l'approche. Le temps de la naïveté à l'égard de la Turquie est révolu. Plus personne ne croit qu'elle est un partenaire de confiance, proche de l'adhésion, ou une forme de démocratie chrétienne à l'orientale. Tout le monde a pu constater le comportement du président et des autorités turcs au cours des derniers mois.

Pour une large part sous notre impulsion, l'unité et la plus grande fermeté européennes ont contraint la Turquie à accepter quelques gestes d'apaisement avec la Grèce et ont conduit à la désescalade en Méditerranée orientale. Il faut rester prudent et vigilant. Les discussions ont repris, même si elles n'ont pour le moment pas débouché sur des avancées concrètes.

Lors du Conseil européen, nous avons discuté du soutien que nous apportons à la Turquie au titre de l'accueil des réfugiés sur son territoire au nombre de quatre millions. C'est une difficulté qu'elle assume et elle le fait aussi dans l'intérêt européen. Elle l'a parfois instrumentalisée et nous sommes dépendants, je vous l'ai dit plusieurs fois. Mais le soutien financier européen ciblé, permettant la prise en charge des réfugiés syriens, est nécessaire. Il a été confirmé dans son principe, financé sur le budget européen, et non par des contributions supplémentaires des États membres. Jusqu'en 2024, environ 3 milliards d'euros permettront de prendre en charge les réfugiés, cet argent ne transitant pas par les autorités turques.

Cela ne nous empêchera donc pas de continuer à tenir un discours de fermeté vis-à-vis de la Turquie, d'autant plus que la situation interne turque en matière de protection des droits et des libertés, notamment des droits des femmes avec le retrait de la convention d'Istanbul, nous préoccupe beaucoup et n'a pas connu d'amélioration, c'est le moins que l'on puisse dire…

Nous avons également évoqué la Russie. Il faut que l'Union européenne mène, dans la durée, une réflexion plus ouverte et plus stratégique sur sa relation avec la Russie. Le Président de la République avait plaidé en ce sens fin mai. Le Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, a présenté un rapport et nous avons partagé un papier franco-allemand avec nos partenaires à l'avant-veille du Conseil européen.

Notre attitude actuelle ne produit pas assez de résultats : il faut certes poursuivre la politique de sanctions européennes sectorielles et individuelles, car le comportement de la Russie ne s'améliore pas, mais cette politique n'a pas changé le régime russe. Il faut donc organiser et structurer le dialogue politique européen qui existe certes, mais par petites touches ou dans le cadre de relations bilatérales. Le Président de la République et la chancelière Merkel ont donc voulu rouvrir le débat.

Il ne s'agit pas d'affaiblir la position européenne ou de naïveté. Même si nous n'obtiendrons pas de résultats probants avec la Russie dans les prochains mois, voire dans les prochaines années, l'histoire et la géographie sont têtues, comme le Président de la République l'a rappelé au cours de la conférence de presse qui a suivi le Conseil. On ne peut ignorer la Russie car c'est notre voisin, mais aussi notre partenaire économique et énergétique. Si elle constitue parfois une menace, elle est également un partenaire nécessaire en matière de sécurité. Il faut donc articuler fermeté et dialogue au niveau européen.

Le sujet est extrêmement sensible, le Président l'a également souligné, car il ne faut pas oublier que certains pays de l'Union européenne – je pense notamment aux pays baltes – ont une relation historique, politique et humaine sensible, difficile, voire douloureuse avec la Russie. Ouvrir ce débat constitue donc toujours un risque. L'Europe doit continuer à être ferme, tout en étant capable d'engager des discussions politiques.

Le Président de la République a également présenté un point d'information sur le Sahel, à la suite des événements récents au Mali. Il a rappelé notre plein soutien à la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) alors qu'au moment du sommet européen, une attaque a fait quinze blessés au sein du contingent allemand. Au nom de la France et, collectivement, au niveau européen, nous avons condamné cette action.

Nous avons également exprimé notre soutien à la poursuite de la mission de formation de l'Union européenne (EUTM) au Mali et à la montée en puissance de la Task Force Takuba, qui regroupe les forces spéciales de différents pays, car il s'agit d'un enjeu de sécurité européenne. Alors que nous avons parfois regretté que la France soit trop seule au Sahel, elle l'est désormais moins : ainsi la Roumanie a voté l'envoi de près de cinquante soldats au sein de la Task Force Takuba, portant à dix le nombre de pays engagés au Sahel dans ces missions difficiles.

Le Président de la République a rappelé la décision française d'ajuster le format de notre engagement. Il ne s'agit pas pour la France de se désengager du Mali, de la région et, encore moins, de la lutte contre le terrorisme, mais de légitimer l'engagement européen en faveur de cet enjeu commun.

Nous avons également brièvement évoqué la Biélorussie, la Libye, l'Éthiopie, autant de sujets différents, et difficiles.

Mais nous avons surtout fait un point plus long sur la loi hongroise du 15 juin 2021. Lors de la réunion des ministres des affaires européennes qui s'est tenue deux jours plus tôt, j'ai exprimé notre ferme condamnation au nom des valeurs européennes. Ces valeurs n'ont pas été définies par des cerveaux occidentaux, qui voudraient humilier la Hongrie, comme le dit le Premier ministre Orbán. Elles figurent dans notre traité, pacte politique et non technique. Quand on adhère à l'Union européenne, on adhère à ses valeurs et à un projet politique, et non uniquement à un projet économique ou juridique.

Les valeurs européennes d'égalité, de non-discrimination, ainsi que d'autres susceptibles d'être violées par la loi hongroise, figurent clairement à l'article 2 du traité. Il ne s'agit donc pas d'une ingérence dans les affaires intérieures hongroises. Évidemment, et personne ne le remet en cause, le gouvernement hongrois a été élu démocratiquement ; son parlement délibère démocratiquement et souverainement, dans un cadre souverainement accepté.

Que contient la loi ? Elle vise à réprimer la pédophilie. Un amendement, introduit en cours de discussion, interdit la promotion d'images à caractère pédophile auprès des mineurs, ce que nous ne pouvons que soutenir à 100 %, ainsi que celle d'images à caractère pornographique, ce qui est différent mais tout aussi légitime. Mais il interdit également, ce qui est inacceptable, les images à caractère homosexuel. Il ne s'agit pas de propagande ou d'incitation – comme j'ai pu l'entendre –, mais seulement d'images ou de publicités. Ainsi, montrer un couple homosexuel à l'école est assimilé par la loi à la diffusion d'un contenu pornographique ou pédophile.

C'est ce point précis – et non toute la loi hongroise, ne créons pas de polémique inutile – qui a légitimé le débat politique dense qui nous a occupés. Cette loi n'est qu'un outil au service d'une stratégie politique, qui reçoit le soutien de certains en Europe. Nous n'avons aucune leçon à donner car cette dérive des valeurs – dérive illibérale comme on l'appelle parfois – peut se développer partout. Nous devons donc faire preuve d'une très grande fermeté. Il ne s'agit pas de s'ingérer dans la politique d'un pays, mais de protéger le pacte européen.

Pour répondre plus précisément à votre question, madame la présidente, oui, les échanges ont été difficiles et tendus. Un chef de gouvernement a indiqué qu'en adhérant à l'Union européenne, on devait adhérer à ses valeurs et que, si on n'y adhérait plus, on devait la quitter. Je n'entrerai pas dans le débat. La sortie, ou l'exclusion, de la Hongrie ne me semble pas crédible, mais elle n'est surtout pas souhaitable. Si la Hongrie sortait de l'Union européenne, ce serait un formidable échec pour nous tous, à commencer par tous ceux, très nombreux, qui croient en l'Europe et aux valeurs européennes en Hongrie, et les défendent.

Nous ne nous sommes pas battus pour réintégrer la Russie au sein du Conseil de l'Europe – même si le contexte était différent – pour faire sortir un pays de l'Union européenne en raison de ses dérives. Ce serait trop facile.

En revanche, les outils dont nous disposons, même s'ils sont insuffisants, doivent être activés le plus vite possible. Lors du sommet, la Commission européenne a indiqué par la voix de sa présidente, Ursula von der Leyen, qu'elle avait engagé dès la semaine dernière des procédures contentieuses contre la loi hongroise, pour les raisons de fond que j'évoquais, à savoir sa contradiction avec certaines valeurs fondamentales du traité.

Il est vrai que nous avons commencé à renforcer les outils en la matière, notamment avec l'adoption en fin d'année 2020 du règlement relatif au respect de l'État de droit, dont j'espère qu'il sera activé dans les prochains mois. Toutefois, ces outils demeurent insuffisants. En effet, nous avons cru qu'il fallait être très exigeant quant au respect des valeurs dans la phase des négociations d'adhésion à l'Union européenne, ce en quoi nous avions raison, mais qu'une fois qu'un État serait devenu membre, la question ne se poserait plus : nous pensions que personne ne voudrait intégrer l'Union pour en bafouer les valeurs. Or force est de constater que la question se pose, au sein même de notre projet politique européen ; le phénomène dépasse même le cadre d'une loi ou d'un gouvernement. C'est un point sur lequel il faut s'interroger, notamment dans le cadre de la conférence sur l'avenir de l'Europe.

Nous devrons faire en sorte que le dialogue politique soit plus ferme, car cela compte aussi. Le fait que le Conseil européen se soit saisi avec vigueur et aussi rapidement de la question, s'agissant de la Hongrie, est d'ailleurs un bon signal. Mais il faut disposer d'outils juridiques et financiers plus puissants pour sanctionner de telles dérives.

Il ne s'agit pas, je le répète, d'aller contre la volonté populaire de tel ou tel pays : il y va du respect de certains principes fondamentaux de l'Union européenne. Vous savez à quel point je défends l'Union européenne, même dans les moments difficiles, mais comment pouvons-nous prétendre que nous construisons un projet politique, un projet de souveraineté, fondé sur des valeurs et une identité, si nous ne sommes pas capables de faire respecter des principes aussi déterminants que ceux dont il est question ici ? C'est un débat compliqué, que nous devons ouvrir sans faiblesse, sans exclusive – et sans exclusion. Il doit être mené avec plus de fermeté encore que durant ces derniers mois. À cet égard, la prise de conscience qui a eu lieu lors du Conseil européen est rassurante, car elle montre que les valeurs européennes parlent aux citoyens et à leurs dirigeants – comme c'est le devoir de ces derniers –, et qu'on ne les attaque pas impunément, de l'extérieur ou de l'intérieur.

Si je n'ai pas parlé du Brexit, ce n'est pas à cause d'une overdose de ce sujet : c'est parce qu'il n'y a pas eu de nouveau développement lors du Conseil européen. La question avait été évoquée, à la demande de la France, lors de la précédente réunion, à la fin du mois de mai. Tout n'a pas été réglé. Certains points d'application, s'agissant notamment du protocole nord-irlandais et des licences de pêche – sujet qui concerne plus directement la France –, ne sont pas satisfaisants. Néanmoins, nous avons eu quelques bonnes nouvelles. Hier, les autorités de Jersey ont prolongé la durée des autorisations provisoires de naviguer dans les eaux des îles anglo-normandes données à nos pêcheurs. Nous avons également trouvé un accord avec le Royaume-Uni sur les transferts de données, ce qui permet de maintenir des flux économiques très importants. C'est une bonne nouvelle en termes d'attractivité économique ainsi que pour nos concitoyens. Il était dans l'intérêt des deux pays qu'un accord soit trouvé sur ce point, mais cela devait se faire à nos conditions. Si nous avons abouti, c'est parce que la Commission européenne a estimé que les règles britanniques en matière de protection des données restaient de même niveau que les nôtres, et si ce ne devait plus être le cas, nous pourrions révoquer l'autorisation.

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