La DCPAF a tout de suite pris conscience du risque auquel pouvait nous exposer la Chine. Nous avons été les premiers à en alerter nos autorités. Fin janvier, avec quelques personnels de santé, nous avions déjà mis en place des modalités pour prendre la température des passagers aux portes des avions. Nous n'en étions pas encore à la fermeture des frontières mais nous étions en préalerte.
La frontière avec la Chine a été fermée le 13 mars, comme celle de tous les pays. Il n'y a pas eu de dérogation chinoise mais les vols depuis la Chine ou vers la Chine se sont poursuivis. Les frontières ont été fermées, sous réserve du régime d'autorisation précédemment évoqué mais les liaisons aériennes avec la Chine se sont poursuivies au-delà du 17 mars, sous la condition de produire des attestations de déplacement international dérogatoire ou d'autres justificatifs. Le trafic aérien n'a pas pris fin mais le régime de circulation des personnes a été totalement modifié. Il ne faut pas attendre aujourd'hui de réouverture des frontières avec la Chine puisque le trafic se poursuit, même si les conditions sont très restreintes, du fait du classement de la Chine parmi les pays à risque. La Chine est soumise à un régime d'autorisation, comme la plupart des pays, à l'exception des treize pays « verts » listés par l'Union européenne.
Nous avons rapatrié à Sète plus de 4 000 autocaristes, coincés au Maroc où ils passaient leurs vacances parce que les autorités marocaines avaient fermé physiquement leur frontière. Il en a été de même pour les croisiéristes bloqués dans d'autres pays.
Il ne revient pas à la police aux frontières mais à l'ARS de vérifier la validité des tests de moins de soixante-douze heures. Nous n'émettons pas d'avis. C'est elle qui nous dit si un test est valable ou pas. Nous ne sommes pas une police sanitaire et nous ne nous prononçons pas sur la validité d'un test, sauf pour mettre en évidence les trafics de faux tests, comme nous l'avons fait la semaine dernière. Les tests étant nationaux, l'ARS s'est organisée pour traduire des résultats rédigés dans des langues étrangères et, parfois, sur des téléphones portables. Il faut donner une certaine souplesse au dispositif.
S'agissant de la lutte contre l'immigration irrégulière, les flux migratoires aux frontières extérieures se sont effondrés pendant le confinement. Ceux qui n'arrivaient pas par les frontières extérieures avaient du mal à arriver par les frontières intérieures. Nous avons enregistré une baisse globale des flux de 40 %, dont 65 % en mars, 71 % en avril et 17 % en mai avec une reprise à partir de juin. En juillet et août, nous avons observé une croissance de 43 % des flux migratoires, par un effet de rattrapage des pays sources d'immigration. Beaucoup de Libyens sont arrivés par l'Italie. De nombreux Tunisiens, Marocains et d'autres ressortissants ont transité par la Grèce ou les Balkans ‑ Afghans, Irakiens ou Syriens. Les mouvements migratoires se sont modifiés. Le Maroc ayant fermé ses frontières, on a constaté des flux de Marocains vers les Canaries.
Ces personnes ne présentant évidemment pas les attestations nécessaires pour circuler, nous partions du principe qu'une personne en situation irrégulière n'offrait pas les garanties sanitaires. Le refus d'entrée était pratiqué à la frontière. Ce n'était pas un refus « sec », car les personnes étaient remises aux autorités du pays limitrophe, l'Italie ou l'Espagne. Un Marocain non-admis à la frontière franco-italienne était remis à la police italienne, non seulement parce qu'il était en situation irrégulière, mais aussi parce qu'il pouvait être en infraction avec les règles sanitaires en vigueur en Italie. Ce travail s'est fait en parfaite coopération avec l'ensemble de nos homologues étrangers.
Des centres de rétention ont fonctionné, durant quelque temps, en mode dégradé, parce que les pays étaient fermés à l'entrée en France mais aussi dans l'autre sens. Cependant, malgré la fermeture de onze centres et le maintien en activité de huit autres, certaines mesures d'éloignements ont pu être appliquées. Encore aujourd'hui, ces mesures sont mises en œuvre vers des pays qui acceptent les retours, tels que l'Albanie et la Géorgie, en fonction des règles qui leur sont propres, car nous ne pouvons pas leur imposer les nôtres. À partir du mois de juin, après la réouverture des frontières intérieures, nous avons rouvert la totalité des dix-neuf centres de rétention gérés par la police aux frontières.
Durant la période du confinement – et encore aujourd'hui ‑, des unités médicales étaient présentes dans les centres de rétention. Un protocole du ministère de la santé du 17 mars, et un autre du 17 juillet, définis en coopération avec le ministère de l'intérieur, décrivent les opérations d'entrée dans un centre de rétention, de vie au sein de ce centre ainsi que les modalités d'éloignement du retenu. À leur entrée dans un centre, tous les retenus font l'objet d'un examen clinique de leur état sanitaire et d'un suivi. Les personnes suspectes d'être positives au coronavirus sont soumises à un isolement sanitaire, le temps de pratiquer des tests ou d'approfondir la situation. Curieusement, dans les centres de rétention gérés par la police aux frontières, nous n'avons eu que seize cas positifs et vingt-huit cas de suspicion. Sans doute faisiez-vous allusion à la situation connue au mois d'août au centre du Mesnil-Amelot. Quand on découvre un cas positif, le centre est neutralisé, il n'y a plus ni entrée ni sortie et tous les intervenants, policiers, retenus, personnels de santé ou intervenants extérieurs, sont soumis à des tests afin de lever tout doute.