Je reviens sur les déchets à propos desquels le document ne nous livre pas d'informations. Je trouve ceci à la fois regrettable et préoccupant. Certaines catégories de déchets ne sont en effet pas couvertes par le plan proposé et ne l'étaient pas non plus par le passé. Pour le dire autrement, il y a, me semble-t-il, un angle mort dans le contrôle parlementaire relatif aux déchets nucléaires.
En effet, l'industrie civile n'est pas la seule utilisatrice d'uranium et de plutonium. La défense de notre pays est aussi fondée en partie sur la dissuasion nucléaire, tandis que l'énergie atomique propulse certains sous-marins de notre flotte, leur donnant un rayon d'action très étendu et une autonomie maximale. Cette activité produit elle aussi des déchets, mais le PNGMDR ne les évoque nulle part, bien qu'il ne soit pas précisé qu'il doive porter seulement sur les matières et déchets radioactifs d'origine civile.
À de nombreuses reprises, nous avons cherché à entendre des responsables militaires au sujet du traitement des déchets radioactifs produits par les armées. Dans le cadre de la visite du Premier ministre à Verdun, le 2 juillet 2021, j'avais directement interrogé le futur chef d'état-major des armées à ce propos. Il ne s'était pas déclaré fermé à l'idée d'être entendu par nous dans le cadre des travaux préparatoires mais il s'est ultérieurement révélé impossible de programmer cet entretien.
Certes, l'inventaire national des déchets radioactifs apporte quelques éléments chiffrés sur les volumes concernés, qui représentent environ 230 mètres cubes de déchets de haute activité, mais ce n'est pas exhaustif. Nous recommandons donc que les prochaines éditions du PNGMDR incluent des informations sur cette catégorie de déchets de façon que le document fournisse une vision globale et stratégique des perspectives de traitement de l'ensemble des déchets présents sur le territoire, que leur origine soit militaire ou civile. Je précise que nous nous inscrivons dans les pas de Christian Bataille, qui avait déjà demandé cela à la fin des années 1990. Il faudra aussi que le document précise le sort des déchets bitumés – sur lesquels a été lancée une revue internationale – et fasse le point sur les solutions techniques au phénomène de dégagement d'hydrogène auquel ces déchets pourraient être sujets.
Un autre manquement est à relever : le document ne contient aucune donnée financière précise. À mon sens, le Parlement doit pourtant aborder la question du traitement des déchets non seulement dans sa dimension environnementale, sur la question des volumes, mais aussi dans sa dimension financière. La Cour des comptes peut nous y aider. En juillet 2019, elle a publié un rapport public thématique sur l'aval du cycle du combustible nucléaire. Sur cette base, j'ai interrogé la ministre de la transition écologique et solidaire sur l'évaluation et le provisionnement des dépenses de gestion des déchets radioactifs et en particulier sur les montants immobilisés par les exploitants, afin de savoir à quelle fréquence ils sont actualisés. Tout ceci doit faire partie de l'information régulièrement transmise au Parlement.
C'est pourquoi nous recommandons que la prochaine édition du PNGMDR soit complétée d'un volet financier où seraient agrégées les sommes provisionnées par les opérateurs dans la perspective de l'élimination des déchets, en présentant divers scénarios.