Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du mardi 21 septembre 2021 à 15h00
Responsabilité pénale et sécurité intérieure — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Nous voterons, nous, cette motion de rejet, pour des raisons de fond. Puisque vous dites n'avoir pas entendu d'arguments pendant quinze minutes, je vais essayer, en deux minutes, de vous expliquer ces raisons.

L'écrasante majorité des professionnels du droit, de la psychiatrie et des associations de défense des droits humains rejettent ce projet de loi. Ils déplorent un mauvais pot-pourri, qui regroupe des dispositions déjà censurées par le Conseil constitutionnel, sans cohérence, mais d'une grande dangerosité.

C'est la septième loi sécuritaire du quinquennat, avant une huitième qu'on nous annonce pour cet hiver ; c'est un texte de plus qui ne se donne aucun moyen concret pour résoudre des problèmes au demeurant mal posés. Selon les termes même de l'exposé des motifs du projet de loi, le Gouvernement prétendait notamment répondre, après l'affaire Halimi, « à l'incompréhension que cette décision [de la Cour de cassation] a provoquée dans une partie de l'opinion publique ». Or les dispositions du projet de loi ne s'appliquent pas à cette affaire, et n'auraient rien changé à son issue.

À quoi tout cela sert-il alors ? Eh bien à dire qu'on – on, c'est-à-dire le président-candidat Macron en campagne pour l'élection de 2022 – a fait quelque chose. Cela affaiblit aussi un principe fondamental du droit, et cela stigmatise encore un peu plus les personnes atteintes de troubles psychiatriques.

Ainsi, à rebours des recommandations du rapport Houillon-Raimbourg, de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté ou encore de l'Observatoire international des prisons, et même des associations de victimes et de leurs familles, il n'y a rien dans ce texte qui renforce l'accompagnement de ces derniers, rien qui renforce le suivi des personnes atteintes de troubles psychiatriques ; il n'y a pas de recrutement massif d'expertes et experts psychiatres et psychologues, pas d'augmentation de leur rémunération ; il n'y a rien sur le cadrage de l'expertise légale.

Le versant consacré à la sécurité intérieure suit la même logique, celle du « tout sécuritaire », au détriment des droits, de la liberté et de la sécurité des citoyens et citoyennes et même des agents et agentes publics.

De l'abandon du principe, fondamental en droit, de l'irresponsabilité pénale à la violation du droit à la vie privée, en passant par la remise en cause de la spécialisation de la justice des mineurs ou par la privatisation des missions régaliennes de police, ce texte est contraire aux principes constitutifs de notre État de droit démocratique.

Nous voterons donc en faveur de la motion de rejet.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.