Intervention de Loïc Prud'homme

Séance en hémicycle du mardi 28 septembre 2021 à 15h00
Adaptation au droit de l'union européenne dans le domaine des transports de l'environnement de l'économie et des finances — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLoïc Prud'homme :

« Silence, on pollue ! » C'est bien ce message que vous aurez adressé pendant cinq ans aux militants écologistes : faites moins de bruit, s'il vous plaît, la Macronie souhaiterait polluer dans le calme ! Pour les faire taire, vous redoublez d'imagination : plus les preuves de votre inaction en matière climatique s'accumulent, plus vous réprimez celles et ceux qui vous le rappellent. En juin 2019, des centaines de militants d'Extinction Rebellion s'étaient réunis à Paris, sur le pont de Sully. Non violents, ils se tenaient assis, arborant des pancartes : « Rebellons-nous pour le vivant ». Ils ont été gazés en plein visage, matraqués, insultés. Silence, la Macronie pollue !

Même rengaine à Bure, où des militants opposés au projet CIGEO d'enfouissement des déchets nucléaires ont été durant des années suivis, mis sur écoute, interpellés, placés en garde à vue, parfois interdits de territoire – en bref, traités comme des terroristes. Leur procès s'est tenu en juillet : tous les prévenus ont été finalement relaxés du chef d'accusation d'« association de malfaiteurs », ce qui laisse entendre qu'ils faisaient l'objet d'une procédure disproportionnée. Silence, la Macronie pollue ! En juin 2020, des écologistes ont mené une action sur une piste de l'aéroport d'Orly : en vue de lutter contre le dérèglement climatique et l'effondrement de la biodiversité, ils réclamaient l'interdiction immédiate de tous les vols intérieurs. Le journaliste Alexandre-Reza Kokabi, travaillant pour le site Reporterre, qui se trouvait sur place afin de couvrir cette action, a écopé d'une amende de 750 euros ; des militants ont été mis en garde à vue et poursuivis. Silence, la Macronie pollue !

Près de chez moi, la lanceuse d'alerte Valérie Murat, porte-parole de l'association Alerte aux toxiques, traînée en justice par l'interprofessionnelle des vins de Bordeaux, a été condamnée à 125 000 euros de dommages et intérêts ; on tente à présent de l'empêcher de faire appel. Son unique forfait : avoir analysé et publié la composition de vins bourrés de pesticides quoique bénéficiant du label HVE – haute valeur environnementale. Elle a révélé que ce dernier n'était qu'une mascarade ; elle l'aura payé cher. Sa condamnation est à ce jour la plus lourde d'Europe dans la catégorie des procès « bâillons ». Même faute, même peine pour les responsables de l'association Alerte pesticides Haute-Gironde, qui ont vu débarquer en armes, un dimanche, des gendarmes appartenant à la fameuse cellule Déméter, venus veiller à ce qu'au cours d'une simple réunion entre consommateurs et producteurs, il ne soit pas dit trop de mal du système agro-industriel.

Jusqu'au fond des campagnes, silence, la Macronie pollue ! Du reste, elle ne l'ignore pas : en Europe, la France est le deuxième émetteur de gaz à effet de serre et le rythme de la baisse de ces émissions s'y trouve l'un des plus faibles. Selon le Haut Conseil pour le climat, en raison du retard accumulé dans ce domaine par la France, ce rythme devrait pratiquement doubler pour atteindre au moins 3 % en 2021 et 3,3 % en moyenne durant la période 2024-2028. La Macronie pollue et chouchoute les pollueurs : plus ils font de dégâts, plus ils sont choyés. TotalEnergies émet chaque année davantage de gaz à effet de serre que l'ensemble des Français et nous attire vers une trajectoire de hausse de la température jusqu'à 4,5o C ; son patron ne sera ni frappé d'une amende, ni matraqué, ni gazé.

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