Je sens qu'il faut que je m'explique sur un point : j'en reviens à la question de la qualification, pour que nous nous comprenions bien.
Il existe en France un Centre d'études et de recherche sur les qualifications, dont le siège est à Marseille. C'est bien la preuve que la qualification peut faire l'objet d'une appréciation objective.
Prenons le cas des diplômes professionnels, car ce sont des diplômes qui ne mentent pas : à la sortie, soit on sait faire, soit on ne sait pas faire. Et, si on ne sait pas faire, cela se voit tout de suite, notamment quand on travaille sur une machine qui vaut plusieurs centaines de millions d'euros – car il y en a – et qu'on manipule une matière première.
Au demeurant, d'une certaine façon, tous les diplômes qui sanctionnent la fin des études supérieures sont des diplômes de qualification professionnelle. Quand on finit son droit et que l'on se destine à devenir avocat, il vaut mieux avoir bien compris l'usage du droit – il en va de même en médecine. Voilà pourquoi je fais preuve de « classicisme », comme vous dites. Le classicisme, en la matière, est une revendication de ma famille idéologique et politique, parce que le diplôme doit pouvoir être évalué d'après son contenu, pour entrer dans les conventions collectives.
Dès lors que le diplôme est surchargé de toutes sortes de choses que l'on ajoute de sa propre initiative, ou par la fantaisie d'un pédagogue, sa nature change. C'est pourquoi je suis hostile à ce que l'on ajoute à la notion de « qualification » celle de « compétence », qui n'a rien à voir avec elle, comme je suis hostile à ce que l'on change le contenu d'un diplôme, car il ne peut plus, dès lors, être inclus automatiquement dans une convention collective. Or les conventions collectives articulées sur le système universitaire, cela s'appelle la République sociale. Cela signifie que ce que vous avez acquis a une valeur d'échange, et pas seulement une valeur d'usage. Il y a une valeur d'usage et, parce qu'il y a une valeur d'usage, il y a une valeur d'échange dans les conventions collectives.
C'était une revendication de gauche et j'ai été extrêmement satisfait, puisque vous évoquiez cette époque, que le Premier ministre Lionel Jospin et le Président de la République Jacques Chirac l'aient acceptée. Après tout, c'est avec des civils qu'on fait des militaires.