Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 8 juillet 2021 à 9h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

La commission mixte paritaire a sifflé la fin de la partie pour ce nouveau budget rectificatif, le premier de l'année 2021, certes, mais le cinquième de ce cycle de mesures d'urgence initié en 2020. Nous avions demandé qu'un collectif budgétaire intervienne plus tôt dans l'année, ce qui aurait évité le décret d'avance de plus de 7 milliards d'euros publié en mai dernier. Dans les grandes lignes, ce budget rectificatif prolonge certaines aides essentielles pour les acteurs économiques, ce que nous saluons. S'y ajoutent certains appuis pour les plus démunis ou les collectivités territoriales, ce que nous saluons également.

On relève cependant un écart substantiel entre les annonces et le présent texte, qui est un budget d'urgence : la majorité des crédits ouverts, soit 9,8 milliards d'euros, sont en effet consacrés au seul plan d'urgence. Qu'en est-il de la transition ? Il ne faudrait pas qu'au moment où nous espérons sortir de la crise, la mission "Plan de relance" soit délaissée. Les investissements d'aujourd'hui doivent alimenter la croissance de demain, accélérer les mutations économiques et écologiques.

S'agissant de la répartition des modalités d'accompagnement pour affronter cette période difficile, le groupe Libertés et territoires regrette une nouvelle fois le déséquilibre patent entre les aides aux opérateurs économiques et la faiblesse des aides dédiées aux plus démunis. Nous saluons néanmoins certaines avancées introduites en première lecture, en particulier les aides aux retraités les plus modestes.

Il aurait été possible d'aller plus loin si le Gouvernement avait mieux conditionné les aides aux entreprises, comme le montre l'exemple du report en arrière des déficits des entreprises, dit carry back. L'aménagement de ce dispositif fiscal peut se comprendre, mais pourquoi un déplafonnement total ? N'est-ce pas justement un des excès dont le Gouvernement voulait se préserver ? Notre groupe regrette que l'amendement sénatorial tendant à conditionner ce mécanisme à l'absence de versement de dividendes n'ait pas été retenu par la CMP. Par ailleurs, nous constatons, une fois de plus, que les coûts de certains dispositifs estimés par le Gouvernement n'étaient pas vraiment réalistes.

Le rapport qui nous a été transmis pour préparer le débat d'orientation des finances publiques évalue le coût du carry back à 0,9 milliard d'euros, contre 0,4 milliard d'euros selon ce PLFR. L'estimation a donc doublé en moins d'un mois : qu'en sera-t-il in fine ? De façon plus générale, l'État gagnerait à améliorer et à accentuer les contrôles dans l'attribution des aides.

Par ailleurs, ce texte reste pensé selon une logique uniforme et manque l'opportunité d'une adaptation aux spécificités locales que nous ne cessons de réclamer. Si notre groupe salue bien sûr les efforts menés pour accompagner les régies du bloc communal, chères à notre collègue Jeanine Dubié, qui répondent à des besoins exprimés par les acteurs locaux, la dimension territoriale demeure néanmoins trop absente de ce budget rectificatif. Faut-il le répéter, les élus locaux et les collectivités ont pourtant fait preuve d'une grande efficacité, ces derniers mois, s'appuyant sur leur bonne connaissance du tissu et des acteurs économiques, dont ils savent les besoins.

Lors de nos échanges en première lecture, j'ai plusieurs fois appelé l'attention du Gouvernement sur les particularités de la Corse, ainsi que sur la fragilité et l'urgence de sa situation face à la crise. Notre groupe ne peut donc qu'être déçu de voir qu'une fois de plus, les aides ne sont pas calibrées pour répondre au mieux aux demandes locales, la Corse, territoire le plus affecté par la pandémie, étant trop marginalisée par France relance.

Je ne reviendrai pas sur les épisodes successifs du débat autour de la hausse des tarifs de la TICPE appliquée au GNR. À l'issue des passes d'armes entre le Sénat, le Gouvernement et la majorité sur la date de report, la hausse est reportée en 2023 : nous en prenons acte.

Dernier point, qui nous inquiète tous : l'adoption de ce cinquième budget rectificatif se traduira par un alourdissement de la facture budgétaire. La dette dépassera 118 % du PIB. Qui paiera à la fin ? Comment payer ? Questions essentielles et redoutables, déjà posées et demeurant sans réponse. Nous espérons que les prévisions de croissance du Gouvernement pourront se réaliser. Les députés de notre groupe conserveront la position exprimée en première lecture.

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