Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Séance en hémicycle du jeudi 8 juillet 2021 à 9h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

Les conclusions de la commission mixte paritaire s'inscrivent dans l'esprit du texte initial. Dès lors, notre position n'évoluera pas, et nous nous opposerons comme en première lecture à ce PLFR. Je vais vous rappeler pourquoi.

Avec ce collectif budgétaire, vous prolongez le soutien de l'État et de la puissance publique aux acteurs économiques. Nous avons tous soutenu les aides au chômage partiel, la création du fonds de solidarité ou l'annulation des charges fiscales et des cotisations sociales au bénéfice des TPE – très petites entreprises – les plus durement touchées. Ces mesures étaient nécessaires.

À présent, cependant, vous abandonnez les aides ciblées au profit d'aides plus générales qui seront captées par les plus grandes entreprises. Le meilleur exemple de cette évolution et probablement le dispositif phare du texte : l'extension du carry back. Si l'on opère un déplafonnement total, comme le prévoit l'article 1er , l'État devra rembourser des centaines de millions d'euros d'impôt sur les sociétés aux plus grandes entreprises. On sait par avance à qui profitera cette mesure : aux actionnaires, qui recevront comme si de rien n'était leurs dividendes habituels, payés avec des liquidités fournies par l'État. Vous êtes parfaitement conscients du problème, et vous vous en accommodez, puisque l'amendement voté par le Sénat à l'initiative de nos collègues communistes qui visait à conditionner le carry back à la non-distribution de dividendes a été écarté lors de la CMP.

Une nouvelle fois, vous refusez une conditionnalité des aides publiques qui permettrait d'en faire un véritable outil de politique publique. Comme à chaque fois, tous nos amendements en la matière ont été refusés, que les contreparties soient exprimées en termes d'emplois, de parité ou d'environnement.

Outre cette absence d'écoconditionnalité et ces subventions aux grandes entreprises, vous refusez toujours en bloc toute mesure de solidarité. Vous qui vous inquiétez tant de la dette publique et du déficit, comment pouvez-vous continuer à refuser nos amendements visant à mettre à contribution les plus aisés ? Vous refusez de prendre à bras-le-corps les questions de l'optimisation et de la fraude fiscale. C'est pourtant essentiel, à l'heure où beaucoup d'efforts ont été demandés à certains Français qui ont particulièrement souffert de cette crise.

Ce refus est d'autant plus indécent que vous commencez à préparer les esprits au tour de vis qui aura lieu l'année prochaine, avec la réduction drastique des dépenses publiques, en particulier des dépenses sociales.

Enfin, nous ne nous accommoderons jamais du choix politique que vous avez fait d'abandonner à leur sort des pans entiers de la population, à qui vous avez simplement fait l'aumône de deux aides ponctuelles. Face à une politique qui n'évolue pas, bloquée dans un logiciel néolibéral qui refuse de mettre en son cœur les enjeux sociaux et environnementaux, nous renouvelons aujourd'hui notre opposition.

Vous vous interrogez sur le taux d'abstention aux dernières élections et vous vous en remettez au président de l'Assemblée nationale pour faire des propositions. Tant que vos politiques mettront à l'abri celles et ceux qui devraient contribuer à financer les conséquences de cette crise sanitaire totalement inédite, tant que le sentiment d'injustice sera aussi fort, vous n'aurez pas besoin de chercher plus loin les raisons de l'abstention ; le vote électronique n'y changera rien.

Avez-vous conscience que le sentiment de relégation et d'abandon qui avait alimenté les ronds-points lors du mouvement des gilets jaunes n'a en rien reculé ? Sortez enfin de vos certitudes !

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