Intervention de Adrien Taquet

Séance en hémicycle du lundi 19 juillet 2021 à 16h00
Modernisation de la gestion des finances publiques et financement de la sécurité sociale — Présentation commune

Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles :

Nous sommes réunis aujourd'hui pour répondre aux enjeux de la gouvernance des finances publiques, avec deux propositions de loi organiques et deux propositions de lois ordinaires. Même si je me sens bien entendu concerné par les textes du rapporteur général Laurent Saint-Martin, puisque les politiques de l'enfance et de la famille contribuent à la situation globale du budget de l'État et des finances publiques, je concentrerai mon propos, au titre de la sphère sociale que je représente, sur les deux propositions de loi déposées par Thomas Mesnier.

Par ces deux textes, il vous est proposé de franchir un pas supplémentaire dans l'appréhension progressive du champ des finances sociales – encore relativement neuf – par le Parlement. La loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale fêtera dans quelques jours ses 16 ans ; à l'inverse de la loi organique relative aux lois de finances, elle n'est pas encore entrée dans sa majorité. Elle a pourtant été modifiée à deux reprises, en 2010 puis il y a un an, mais de manière assez marginale.

Aujourd'hui, vous proposez, de votre propre initiative, une modification d'ampleur, et nous ne pouvons que nous en réjouir. Le fait que votre Assemblée se saisisse de la LOLFSS, à l'image de ce que l'initiative parlementaire avait fait s'agissant des lois de finances, démontre que l'outil que représentent les lois de financement de la sécurité sociale a pleinement joué son rôle.

Les LFSS ont en effet été conçues pour que le Parlement vote sur le budget de la sécurité sociale ; que vous soyez à l'initiative d'une modification d'ampleur de leur procédure est le symbole d'un réel accomplissement. C'est pourquoi je voudrais saluer le travail du rapporteur général Thomas Mesnier, de la commission spéciale présidée par Éric Woerth, mais aussi de tous ceux qui ont nourri votre réflexion, notamment le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFIPS), le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) et, plus récemment, la commission présidée par Jean Arthuis.

La proposition qui vous est soumise s'inscrit aussi et surtout dans un contexte très particulier pour les finances publiques en général, comme l'ont rappelé les précédents intervenants, et pour les finances sociales : le déficit de la sécurité sociale en 2020 atteint ainsi un montant inédit de 38 milliards d'euros et risque de se reproduire en 2021. N'ayons cependant pas honte de ce déficit : il est le symptôme de l'effort inouï entrepris par la sécurité sociale pour protéger l'ensemble des Français durant cette crise majeure, que ce soit à travers notre système de santé ou grâce au filet de sécurité que représente la protection sociale.

La semaine dernière, lors de son allocution télévisée, le Président de la République a comparé notre système de protection sociale à un joyau, et nous savons toutes et tous que les Français y sont légitimement très attachés. Deux tiers de ce déficit sont liés à la chute des recettes, ce qui explique que la situation risque de perdurer, certes dans une moindre ampleur, pendant plusieurs années encore. Notre réponse face à cette situation doit s'inscrire dans la durée et, à cette aune, une réforme d'ampleur des LFSS en constitue la base pour reconstruire une sécurité sociale mieux assise, plus solide et plus efficace.

Pour ce faire, la proposition de loi organique propose une modification ambitieuse, articulée autour de deux axes qui se complètent. Elle entend, en premier lieu, améliorer l'information dont disposera le Parlement, en introduisant, comme l'évoquait le rapporteur Thomas Mesnier, un article liminaire sur le modèle de ceux existant déjà dans les lois de finances. Cet article liminaire constitue un progrès notable parce qu'il permettra pour la première fois de disposer, en loi de financement de la sécurité sociale, d'une information directement lisible et utilisable sur le solde des administrations de la sécurité sociale, qui recouvrent un périmètre légèrement plus large que les LFSS mais qui contribuent pleinement à la dette publique. Le passage vers le déficit public et le ratio de dette publique sur PIB n'en sera que plus aisé.

La proposition de loi organique entend également introduire un compteur des écarts des dépenses de sécurité sociale par rapport aux lois de programmation des finances publiques. Cela ne doit évidemment pas nous amener à abandonner le pilotage de la sécurité sociale par les soldes, qui reste notre boussole, mais, dans un contexte où les recettes ont durablement chuté et où le redressement de nos finances publiques ne devra pas passer par une augmentation des prélèvements obligatoires, les dépenses devront de toute évidence faire l'objet d'une attention particulière.

La référence aux lois de programmations des finances publiques, qui seront votées au début de chaque mandature, permettra également d'adopter un cap engageant.

Cette proposition de loi organique permettra aussi de simplifier et de rendre plus lisible les annexes au PLFSS, en préférant le « mieux » au « plus » en matière d'information, afin que les PLFSS soient plus facilement exploitables et qu'il soit plus aisé d'en débattre.

En second lieu, la proposition de loi organique permettra d'améliorer encore la qualité des débats qui nous réunissent chaque automne autour du PLFSS. La création de projets de lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale permettra ainsi de mieux rythmer le temps de votre action : au printemps, la constatation des comptes échus et, surtout, un débat autour de l'évaluation des politiques financées et des résultats obtenus ; à l'automne, l'actualisation de la trajectoire de l'année en cours et le vote de la trajectoire de l'année à venir. L'article 24 de la Constitution trouvera ainsi sa pleine effectivité dans ce nouveau calendrier : à l'automne le vote de la loi, au printemps le contrôle de l'action du Gouvernement et l'évaluation des politiques publiques.

Vous proposez, dans le même mouvement, de rapprocher les calendriers des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale : nous ne pouvons que nous en réjouir. Ces textes constituent les deux jambes de nos finances publiques, et l'alignement des calendriers permettra un mouvement encore plus synchrone, avec notamment une présentation conjointe des deux textes en Conseil des ministres pour disposer d'une vision synoptique des finances publiques.

Enfin, vous proposez de modifier certaines compétences des lois de financement de la sécurité sociale pour rendre les textes plus lisibles ou plus pertinents : je pense à la redéfinition des relations financières entre l'État et la sécurité sociale, à la clarification des règles d'inscription de mesures ayant un impact sur les finances sociales ou encore aux règles de compétences en matière d'exonérations de cotisations sociales.

En mobilisant l'ensemble de ces instruments, ces propositions de lois permettront d'obtenir des LFSS plus lisibles et des débats mieux organisés et plus efficaces. Elles jettent ainsi les bases d'une reconstruction de nos finances sociales et nous pouvons collectivement nous en féliciter.

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