Intervention de Cendra Motin

Séance en hémicycle du lundi 19 juillet 2021 à 16h00
Modernisation de la gestion des finances publiques et financement de la sécurité sociale — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCendra Motin :

C'est dans la torpeur d'un après-midi d'été, alors que le Tour de France vient de livrer son vainqueur sur les Champs-Élysées et alors que chacun se prépare à adapter ses vacances au nouveau variant delta du coronavirus, pour se protéger et protéger les autres ; c'est au cœur du mois de juillet, donc, que nous sommes saisis par nos éminents rapporteurs budgétaires et par le président de la non moins éminente commission des finances, de textes dont le formalisme n'invite guère à la passion, mais qui, sous leur aspect austère, sont en réalité d'une portée politique peu commune.

Ces propositions de loi s'inscrivent dans la lignée des textes organiques nés au début des années 2000, qui ont consacré, d'une part, une vision thématique du budget déclinée par politique publique, et, d'autre part, la volonté de fixer des objectifs et de mesurer la performance avec laquelle l'argent des Français est utilisé – car c'est bien de cela qu'il est question : la bonne utilisation des deniers publics, l'efficacité des politiques publiques ainsi financées et l'atteinte des objectifs votés par le Parlement.

Dans le même temps, ces textes tirent les enseignements de quinze années de pratique des deux discussions budgétaires : aussi renforcent-ils les pouvoirs des parlementaires et donnent-ils toute sa place à l'évaluation, sujet cher à la majorité et à la présente législature.

De quoi passionner les parlementaires les plus avisés, me direz-vous, mais comment embarquer les autres, et surtout les Français ? Peut-être, déjà, en rappelant qu'on ne vote pas une loi organique toutes les semaines : celle-ci sert à organiser les pouvoirs au sein des institutions, or on ne revoit pas tous les jours l'équilibre des pouvoirs entre le Parlement, le Gouvernement, les administrations et les juges.

Voilà qui confère aux présents textes une première dimension exceptionnelle, d'autant qu'ils procèdent à un rééquilibrage au profit des parlementaires : ils nous donnent plus de temps pour étudier des textes déposés plus tôt sur le bureau de l'Assemblée ; ils nous permettent de nous plonger plus tôt dans l'arc-en-ciel des rapports mis à notre disposition par Bercy ; ils revoient enfin le calendrier des textes de fin de gestion, afin de continuer à rationaliser l'examen des budgets.

Comment embarquer les Français, donc ? En expliquant, aussi, les avancées majeures que contiennent ces textes pour rendre l'utilisation de l'argent public plus compréhensible. Concernant le budget de l'État, parlons de la réorganisation des taxes affectées – plébiscitées par les Français, car ils en connaissent par avance l'objectif : elles seront plus visibles, plus lisibles, mieux suivies et mieux pilotées.

Évoquons également le débat annuel sur la dette, sujet qui inquiète particulièrement nos concitoyens – ils entendent tout et son contraire sur ce qu'il faudrait faire : leurs représentants tiendront désormais une discussion politique, fondée sur un rapport remis par le Gouvernement, avant le début des discussions budgétaires.

N'oublions pas, enfin, de mentionner la possibilité offerte aux parlementaires d'intervenir dans la définition des indicateurs de performance budgétaires. Formulé en ces termes, cela n'a pas l'air fantastique mais, si je vous explique que nous pourrons ainsi choisir les critères permettant de déterminer si une politique publique est performante ou non, c'est sûrement plus parlant, et un peu plus enthousiasmant !

Concernant la sécurité sociale, la réorganisation des nombreuses annexes qui ont fleuri ces quinze dernières années permettra d'y voir plus clair et de mieux exploiter ces mines d'informations, certes précieuses mais un peu trop foisonnantes. L'alignement du calendrier avec celui du projet de loi de finances de l'État sera un atout indéniable, tant les délais étaient courts pour entrer dans le détail des mesures proposées et pour soumettre des amendements. Enfin, comment ne pas saluer l'intégration, dans le champ de la loi de financement, de la dette des établissements médico-sociaux et des hôpitaux, pour lesquels nous avons engagé un plan de 13 milliards d'euros l'année dernière, et qu'il est essentiel de suivre à travers la loi de financement de la sécurité sociale ?

Par ces deux textes, nous affirmons haut et fort que nous, parlementaires, avons un rôle essentiel à jouer pour évaluer les politiques publiques que nous défendons et l'utilisation des crédits que nous votons chaque année à l'Assemblée nationale et au Sénat. Inscrire au niveau de la loi organique – là où s'organisent les pouvoirs au sein des institutions – le Printemps de l'évaluation et la semaine de contrôle consacrée aux évaluations des parlementaires, constitue pour nous une avancée majeure : cela contribuera à une meilleure utilisation de l'argent public.

En tant que rapporteure pour avis de la loi de financement de la sécurité sociale pour la commission des finances, je me réjouis que ces textes soient étudiés conjointement, et qu'ils permettent de réelles avancées dans tous les domaines précités. À titre personnel, j'aurais certes souhaité qu'ils aillent un peu plus loin – j'aurais notamment aimé que les deux commissions se rapprochent davantage dans l'examen des textes, et que nous fassions un ou deux pas supplémentaires sur le chemin de l'extension du champ de la sécurité sociale. Quelques angles morts persistent en effet, et nous empêchent parfois d'avoir une vision claire des mesures que nous envisageons pour nos concitoyens.

Toutefois, ce qui importe avant tout est que nous disposions, grâce à ces textes, d'une meilleure visibilité sur l'ensemble du budget – État et sécurité sociale. Les Français, dans leur grande majorité, n'ont pas une connaissance assez fine des exercices budgétaires pour savoir qui finance quoi ; c'est pourquoi les présentes propositions de loi, qui visent à rapprocher les deux budgets sur la forme et qui consacrent leur évaluation par les parlementaires, sont si importantes, pour que le budget « toutes APU », comme on aime l'appeler dans notre jargon financier, devienne simplement le budget de tous les Français.

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