Intervention de Alain David

Séance en hémicycle du jeudi 22 juillet 2021 à 15h00
Prévention d'actes de terrorisme et renseignement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain David :

Le groupe Socialistes et apparentés est très sensible à la question de la lutte contre le terrorisme. Nos concitoyens doivent être préservés de la barbarie qui nous a cruellement frappés ces dernières années. Notre fonction de législateur doit cependant nous conduire à la plus grande vigilance afin qu'aucune des lois votées ici ne porte atteinte aux libertés fondamentales qui sont au cœur de notre tradition républicaine, juridique et politique. Or non seulement ce texte risque de se révéler inefficace pour lutter contre le terrorisme, mais, de surcroît, il pourrait porter atteinte aux libertés fondamentales. On ne saurait pourtant accepter que le manque de moyens matériels et humains dont souffrent les services de renseignements ait une telle conséquence.

Nous ne sommes pas contre les mesures de surveillance, mais contre les mesures privatives de liberté imposées après que les peines ont été exécutées. Nous ne sommes pas contre les MICAS, mais contre leur inscription définitive dans notre droit, alors que leur actuel statut expérimental permet au Parlement de se prononcer régulièrement sur la nécessité de les maintenir. Nous sommes par ailleurs opposés à ce que ces mesures puissent être prononcées pour une durée maximale de vingt-quatre mois. Douze mois devraient suffire pour engager des poursuites sur la base d'éléments nouveaux. Au-delà de ce délai, rien n'interdira aux services de renseignements de poursuivre la surveillance, pour peu qu'ils en aient les moyens humains et matériels.

Censurées en août 2020 par le Conseil constitutionnel, les mesures de sûreté visaient à imposer à une personne sortant de prison un certain nombre d'obligations, en particulier une assignation à résidence, pour une durée pouvant aller jusqu'à cinq ans. Nous ne sommes pas défavorables à la surveillance, mais ces modalités précises en font presque une condamnation pour dangerosité. Si le Gouvernement a tenu compte de la décision du Conseil constitutionnel, le problème subsiste au niveau politique : encore une fois, le manque de moyens matériels conduit à rogner les principes fondamentaux.

Ce sont les socialistes qui ont initié, en 2015, l'expérimentation des algorithmes dans le domaine de la lutte antiterroriste : là encore, la pérennisation du dispositif signifie tout bonnement que le Parlement n'aura plus à s'interroger sur sa nécessité, c'est-à-dire qu'il en perdra le contrôle. Quant aux autres techniques de surveillance concernées par le texte – l'extension de l'utilisation des algorithmes aux URL, afin de pister les personnes ayant consulté un site donné, ou encore l'interception satellitaire des communications –, nous n'y sommes pas opposés par principe. Nous demandons néanmoins leur maintien au stade expérimental, car, selon l'usage qui en sera fait, elles se trouvent susceptibles d'attenter gravement aux libertés fondamentales ainsi qu'au respect de la vie privée.

Enfin, les historiens vous ont alertés : votre texte risque de restreindre inutilement, dangereusement, l'accès aux archives. Nous l'avons dit et nous le répétons : les services de renseignement n'ont pas besoin d'une nouvelle loi, mais de moyens matériels et humains supplémentaires. Pour l'ensemble de ces motifs, les députés du groupe Socialistes et apparentés voteront contre le projet de loi.

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