Je commencerai, dans cette explication de vote à presque cinq heures dix du matin, par évoquer l'organisation de nos débats. Le projet de loi est arrivé à l'Assemblée lundi à minuit, la commission l'a examiné mardi entre dix-sept heures et cinq heures du matin, tous les groupes n'étaient pas présents et des centaines d'amendements n'ont pas été défendus, mais on nous a demandé de ne surtout pas dire que les travaux avaient été bâclés !
Comment, en effet, parler de travaux bâclés quand des centaines d'amendements ne sont pas examinés et quand des amendements sont soumis à une seconde délibération à cinq heures du matin, pour complaire au Gouvernement, alors que le Sénat attend de pouvoir se pencher sur le projet de loi ! On ne peut que saluer l'organisation du travail législatif au sein de ce parlement…
Depuis plus d'un an, avec mon groupe, nous ne cessons de vous répéter ces trois verbes : prévoir, prévenir, planifier. Ils fondent les différentes propositions que nous formulons, que cela vous plaise ou non.
Alors qu'une quatrième vague se profile pour la fin du mois d'août, vous nous dites une fois encore, monsieur le ministre, que « l'on ne pouvait pas le deviner ». Le fameux variant delta dont on a tant entendu parler au cours des derniers jours se propage en Europe depuis le mois de janvier. Seul ce gouvernement pouvait imaginer qu'il gagnerait tous les pays, sauf la France… Vous vous moquez de nous !
Voilà pourquoi nous vous appelons sans cesse à prévenir et à planifier. Alors que le variant delta envahissait l'Europe, vous avez annoncé au mois de mai la fin du port du masque et l'assouplissement des protocoles sanitaires dans les restaurants. Tout allait bien, chacun était invité à aller se promener et nos chers amis restaurateurs à accueillir toujours plus de clients ! Et vous vous étonnez ensuite que le nombre de vaccinations diminue ! Quand on affirme que la crise sanitaire est derrière nous, les gens ne vont évidemment plus se faire vacciner.
S'agissant de l'obligation vaccinale des soignants, les faits sont têtus, monsieur Véran, et ce que j'ai dit tout à l'heure n'était absolument pas de la démagogie. Je le répète : au mois de mars, lors de la première vague, vous avez affirmé aux soignants qu'ils ne risquaient rien à ne pas porter de masque quand ils s'occupaient des malades de la covid-19. Lors de la deuxième vague, au motif qu'ils étaient asymptomatiques, vous avez demandé aux soignants contaminés de continuer de travailler et de se garder de tout altruisme à l'égard de leurs patients. Lors de la troisième vague, enfin, vous avez dit aux soignants qu'ils devaient avoir plus de 50 ans pour être vaccinés.
Non, ce n'est pas de la démagogie que de le rappeler ; non, ce ne sont pas des mensonges ! Il faut un sacré culot pour me reprocher, dans cet hémicycle, de ne pas promouvoir la vaccination alors que je vis sous protection et que je suis menacée parce que j'ai dit que la meilleure incitation à la vaccination était de se faire vacciner soi-même !
Quant à l'obligation de transparence, nous n'avons pas pu en discuter, mon amendement sur le sujet ayant été jugé irrecevable. Vous obligez les Français et les soignants à se faire vacciner, mais quand obligerez-vous les laboratoires à faire preuve de transparence ? C'est pourtant le seul moyen de faire baisser la défiance de nos concitoyens à leur égard.
Avez-vous discuté de l'application du passe sanitaire avec les patrons de bars, de restaurants, de cinémas et de tous ces lieux, qui désespèrent ? Quels personnels effectueront les contrôles sanitaires et les contrôles d'identité à l'entrée ? Les restaurants manquent déjà cruellement de serveurs. Comment pourraient-ils procéder à de nouvelles embauches ? Que faire si l'on s'aperçoit, au bout d'un quart d'heure, qu'une personne assise en terrasse n'a pas de passe sanitaire ? Elle a peut-être contaminé les personnes présentes autour d'elle… Vous n'avez même pas imaginé ce cas de figure alors que vous prétendez vouloir avant tout protéger les Français !
Enfin, le virus et les transports. Absurdité magnifique ! Le virus est dangereux dans le TGV, il faut donc un passe sanitaire, mais il ne l'est pas dans le métro – c'est connu, le variant delta n'a pas la carte Navigo –, le passe sanitaire n'y est donc pas exigé. Comment voulez-vous que les Français comprennent ? Vous vous moquez du monde !
Personne, dans la vie, ne prévoit quarante-huit heures avant ce qu'il va faire dans une journée. On se promène, on passe devant un cinéma ou un marchand de glaces et on décide de s'arrêter. Sans test, sans passe sanitaire, ce n'est désormais plus possible. Pas de passe, pas de glace ! Pas de passe, pas de place !
Je n'ose imaginer comment se passera la rentrée scolaire puisque vous n'avez pas installé de purificateurs d'air dans les écoles. Pas de passe, pas de classe ! Eh oui, chers collègues, gouverner, c'est prévoir.