La France a accueilli le mois dernier la quarante-troisième réunion consultative du Traité sur l'Antarctique (RCTA). Cette organisation internationale regroupe cinquante-quatre États dont vingt-neuf parties consultatives, c'est-à-dire dont l'activité scientifique en Antarctique justifie leur participation aux éditions annuelles de la RCTA.
Ces réunions sont chargées de la gestion et de la protection du continent antarctique. Elles ont été créées par le traité de Washington, qui a été adopté en 1959 et qui, avec d'autres instruments, constitue le système du Traité sur l'Antarctique. Ce texte exceptionnel proscrit, en Antarctique, toute activité non pacifique ; il y gèle les revendications territoriales et y proclame la liberté de recherche scientifique.
Signé le 4 octobre 1991 et entré en vigueur le 14 janvier 1998, le Protocole au Traité sur l'Antarctique relatif à la protection de l'environnement, dit « protocole de Madrid », complète le traité de Washington et désigne l'Antarctique comme « réserve naturelle consacrée à la paix et à la science ». Élément important du système antarctique, il interdit en outre toute possibilité d'exploitation des ressources minières.
Six annexes adoptées depuis 1991 sont venues approfondir les dispositions de ce protocole. Celle qui fait l'objet du présent projet de loi, l'annexe VI, poursuit les objectifs du protocole en matière de protection globale de l'environnement en Antarctique et des écosystèmes dépendants et associés, en élaborant des règles et des procédure relatives à la responsabilité pour les dommages résultant d'activités se déroulant dans la zone du Traité sur l'Antarctique.
Les « opérateurs » mentionnés par l'annexe VI sont des personnes morales ou physiques, qu'elles soient gouvernementales ou non gouvernementales, qui organisent dans la zone du Traité sur l'Antarctique des programmes de recherche scientifique, des activités de tourisme ou tout autre activité, y compris de soutien logistique, devant faire l'objet d'une notification préalable en vertu du Traité.
S'agissant de la France, entre dix et vingt opérateurs non gouvernementaux soumettent chaque année une demande d'autorisation d'activité en Antarctique. Ces demandes, qui peuvent concerner tout le continent antarctique, sont adressées au préfet des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), désigné comme l'autorité nationale compétente pour prendre ce type de mesures. Les opérateurs non gouvernementaux exercent des activités touristiques, à partir de voiliers – elles ne sont alors pas nécessairement commerciales – ou de navires de croisière.
Actuellement, une unique compagnie de croisière, la société Ponant, opère sous autorisation de l'autorité compétente française. Celle-ci affecte chaque année quatre navires à la zone du Traité sur l'Antarctique et elle a ainsi autorisé 6 673 passagers à se rendre en Antarctique au cours de la saison estivale 2019-2020, soit plus de 10 % du nombre total de passagers ayant visité la région au cours de cette période. Ce chiffre peut paraître peu important comparé à la taille du continent, mais il connaît une très forte croissance et la très grande majorité des touristes visitent uniquement la péninsule de l'Antarctique, qui se trouve dans le prolongement de l'Amérique du Sud.
Concernant les opérateurs gouvernementaux, le préfet des TAAF autorise chaque année de quinze à vingt programmes de recherche scientifiques soutenus par l'Institut polaire français.
Une fois en vigueur, l'annexe VI imposera à l'ensemble de ces opérateurs de prévoir des plans d'urgence pour éviter que leurs activités ne provoquent des dommages significatifs sur l'environnement. Si de tels dommages surviennent malgré tout, l'opérateur responsable devra faire le nécessaire pour qu'ils cessent le plus rapidement possible ; à cet effet, il devra souscrire des garanties spécifiques. S'il n'agit pas, il sera tenu de prendre à sa charge les frais engagés par l'État français ou un État étranger pour mettre fin au dommage.
L'intérêt que la France a toujours manifesté pour l'Antarctique depuis son exploration l'a conduite à signer et à ratifier le Traité dès 1959. Par la suite, grâce à l'action de Michel Rocard, elle a largement contribué à l'adoption du protocole de Madrid du 4 octobre 1991, qui vise à protéger l'environnement de l'Antarctique.
La France ayant déjà approuvé les annexes I à V au protocole de Madrid, l'approbation de l'annexe VI lui permettra d'être partie à l'ensemble des engagements internationaux concernant l'Antarctique. À ce jour, sur les vingt-neuf parties consultatives au traité, onze États doivent encore approuver l'annexe VI, laquelle ne pourra entrer en vigueur que lorsqu'ils auront tous effectué cette démarche.
Telles sont les principales observations qu'appelle l'annexe VI au Protocole au Traité sur l'Antarctique relatif à la protection de l'environnement, portant sur la responsabilité découlant de situations critiques pour l'environnement, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.