Intervention de Dimitri Houbron

Séance en hémicycle du jeudi 15 avril 2021 à 15h00
Protection des jeunes mineurs contre les crimes sexuels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

J'adresse d'abord mes remerciements sincères à la rapporteure pour la qualité des échanges que nous avons eus tout au long de l'examen de ce texte, ainsi qu'aux deux membres du Gouvernement présents au banc, qui ont contribué activement à l'aboutissement de cette proposition de loi.

Nous sommes amenés à débattre en deuxième lecture d'une proposition de loi visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste. Je ne reprendrai pas, cette fois, les chiffres effroyables attestant du drame qui touche nombre d'enfants en France : ces chiffres sont terrifiants. La politique pénale, mais aussi, de façon générale, les politiques publiques, se doivent d'y apporter des réponses.

Au-delà de cette proposition de loi, indispensable pour doter le système judiciaire des outils juridiques nécessaires, il nous faut sensibiliser, former et prévenir ces violences. S'il faut bien sûr libérer la parole et mieux comprendre les mécanismes à l'œuvre, il faut, au-delà, que la société tout entière s'empare pleinement de ce combat commun. Il faut que les médias nous aident, en parlent, alertent et sensibilisent. Rappelons, s'il en était besoin, que nous sommes certes sur le point de faire une petite révolution juridique à travers cette proposition de loi, mais que nous ne sommes que législateurs. Notre rôle est d'améliorer la loi, mais nous ne parviendrons pas à endiguer seuls ce fléau : c'est à la société tout entière de mener ce combat.

L'objet de cette proposition de loi est de poser des interdits clairs et de renforcer l'arsenal législatif pénal permettant de protéger les mineurs victimes de violences sexuelles, d'abord par la création du crime de viol sur mineur de 15 ans, puni de vingt ans de réclusion criminelle, ainsi que du crime de viol incestueux sur mineur de moins de 18 ans, qui sera qualifié d'inceste.

Cette proposition de loi instaure également le délit d'agression sexuelle sur mineur de moins de 15 ans, puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende, ainsi que le délit d'agression sexuelle incestueuse sur mineur de moins de 18 ans.

Contrairement à la situation actuelle, les juges n'auront plus à établir une violence, une contrainte, une menace ou une surprise pour constater et punir le viol ou l'agression sexuelle. La question du consentement de l'enfant ne se posera donc plus en dessous de l'âge de 15 ans – et de 18 ans dans les affaires d'inceste.

Les amours adolescentes ne sont pas visées, puisqu'une clause dite Roméo et Juliette préserve ces relations sexuelles lorsque le mineur et le majeur ont moins de cinq ans d'écart d'âge, par exemple un mineur de 14 ans et une jeune majeure de 18 ans. Cette clause ne jouera évidemment pas dans le cas d'une relation non consentie et sera également écartée dans le cas d'une relation tarifée, notamment dans le cadre de la prostitution.

Le texte, tel qu'amendé, complète aussi la définition du viol en y mentionnant les actes bucco-génitaux et étend le périmètre de l'inceste aux grands-oncles et grands-tantes.

Cette proposition de loi introduit également un principe de prescription glissante. Le délai pourra être rallongé si la même personne viole ou agresse sexuellement par la suite un autre enfant, jusqu'à la date de prescription de la nouvelle infraction.

Toujours en matière de prescription, et afin d'inciter les personnes qui ont connaissance de violences commises sur un enfant à les signaler, le délai de prescription du délit de non-dénonciation de sévices est allongé. Vous le savez, le groupe Agir ensemble s'est battu depuis le début des débats sur ce point. Nous sommes satisfaits de constater que ce délai est porté à dix ans à partir de la majorité de la victime en cas d'agression ou d'atteinte sexuelle et à vingt ans à partir de la majorité de la victime en cas de viol, au lieu de six ans à compter de l'infraction actuellement.

Je salue ensuite l'amendement voté par notre assemblée qui, pour répondre à une demande forte des acteurs de terrain et pour lutter contre le phénomène de « sextorsion », crée un délit puni de dix ans de prison réprimant le fait, pour un adulte, d'inciter un enfant de moins de 15 ans à se livrer à des pratiques sexuelles sur internet.

Une disposition adoptée par le Sénat prévoit enfin l'inscription automatique des auteurs d'infractions sexuelles, quelle que soit la peine encourue, lorsque la victime est mineure, dans le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'agressions sexuelles ou violentes. Les fichiers judiciaires sont de formidables outils de prévention dont il est important de se saisir, particulièrement dans le cadre de la lutte contre les violences sexuelles faites aux mineurs.

Cette proposition de loi aborde de nombreux sujets. Les cinq minutes qui me sont imparties sont bien insuffisantes pour les évoquer tous. Le groupe Agir ensemble sera en tout cas au rendez-vous, avec humilité et détermination, pour voter cette proposition de loi et ainsi améliorer la protection de ces innocences en danger, de ces enfants garants de la continuité du monde.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.