Intervention de Loïc Prud'homme

Séance en hémicycle du vendredi 16 avril 2021 à 15h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Article 59

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLoïc Prud'homme :

Nous attaquons le titre V, « Se nourrir », qui a pour objectif – c'est écrit dans le texte – de soutenir une alimentation saine et durable, peu émettrice de gaz à effet de serre. Nous sommes effectivement au cœur du sujet, puisque la production alimentaire et, plus largement, la consommation alimentaire pèsent pour un tiers dans nos émissions de gaz à effet de serre. Ce titre est donc très important ; la discussion sur les menus végétariens est particulièrement cruciale dans la question de la consommation alimentaire. Les discussions relatives à ce choix visent précisément à le rendre possible. Il s'agit de permettre qu'il y ait un choix, que les convives des restaurants scolaires aient cette possibilité ; ce n'est pas une contrainte, c'est vraiment la possibilité de choisir de manger végétarien, parce que cela a plusieurs impacts.

Un impact d'abord sur la durabilité, objectif que vous recherchez. Une alimentation moins carnée permet de réduire la déforestation, parce que les protéines végétales importées, notamment du Brésil, participent à la déforestation importée. De plus, la majorité de la viande consommée dans notre pays – 60 % – est importée. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'interprofession de la viande (Interbev). Monsieur le ministre de l'agriculture, si on veut relocaliser, il faut pouvoir réorienter la valeur vers les producteurs locaux de viande. Pour ce faire, quoi de plus évident et de plus puissant que de dire que l'option du menu végétarien, moins cher à produire qu'un menu carné, permettra des économies ? Si, au lieu de deux menus carnés, sont proposés un menu végétarien et un seul menu carné, on dégage de la valeur que les intendants et autres gestionnaires de restauration collective pourront investir dans des produits bios et locaux. C'est d'ailleurs avéré, puisque là où le choix d'un menu alternatif végétarien a été fait, les achats ont été le plus massivement réorientés vers une production locale et souvent bio, qui permet d'allier le durable au sain.

Les bienfaits d'une alimentation plus végétalisée ont fait l'objet de discussions, parfois avec un peu de caricature – de part et d'autre, j'en conviens. Des études sont sans ambiguïté au sujet de la qualité sanitaire de l'option végétarienne ; celles du HCSP (Haut conseil de la santé publique) et de l'ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) disent qu'il y a des bienfaits à davantage végétaliser l'alimentation, en particulier pour améliorer les apports en fibres et en vitamines, qui font cruellement défaut à une majorité de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Vous savez que je suis très attaché à la question d'une alimentation saine, pour m'y être impliqué et avoir auditionné beaucoup de spécialistes.

Enfin, c'est aussi une question de justice sociale, puisque la carence principale de nos concitoyens les plus fragiles n'est pas une carence en protéines animales – souvent de mauvaise qualité, je l'ai déjà évoqué –, mais la carence en fruits et légumes frais, de qualité et, si possible, de proximité. L'option végétarienne va permettre à des enfants, notamment, d'avoir enfin un accès régulier, hebdomadaire, à des fruits et à des légumes. Elle apportera des bienfaits sanitaires à l'ensemble de la population, au moment où nous avons affaire à de véritables vagues de maladies chroniques – diabète et obésité en particulier. Cette mesure aura donc un impact réel sur la santé de nos concitoyens, ce qui permettra aussi d'économiser beaucoup de frais médicaux. Bref, ce choix n'apporte que des bienfaits, il n'enlève aucune liberté à personne, ne retire aucune plus-value ni aucune manne à l'agriculture locale. Au contraire, il réoriente l'approvisionnement vers les productions locales ; M. Jean-Baptiste Moreau va sans doute intervenir sur cette question.

Il faut poser des questions précises et ne pas fonder nos débats sur des fantasmes mais sur des faits avérés par des publications scientifiques, désormais nombreuses et documentées.

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