Deux ans après le vote de la loi ÉGALIM, force est de constater que l'espoir suscité par les états généraux de l'alimentation, puis par cette loi, a fait long feu. Si les intentions étaient louables, les avancées sont plus qu'insuffisantes. Nombreux encore sont les producteurs qui peinent à vivre dignement de leur travail. Ils n'ont pourtant eu de cesse de réclamer à juste titre que le coût de production soit à la base de la formation des prix dans le cadre des contrats ou des accords cadres. Mais concrètement, le rapport de forces est toujours favorable aux industriels, et surtout à la grande distribution. Le terme de chaîne alimentaire est parfaitement adapté : les gros poissons dévorent les petits ; en créole, « le gros i manj le pti ».
Monsieur le ministre, qu'attendez-vous pour aller au bout de la démarche et faire en sorte que les travailleurs de la mer et de la terre soient justement rémunérés ? Vous serez d'accord : il est inconcevable qu'un agriculteur, une éleveuse ou un pêcheur, au lieu de gagner de l'argent, en perde lorsqu'il livre le fruit de son travail. Le premier confinement a mis en évidence l'absolue nécessité de la souveraineté alimentaire, et je ne doute pas que vous la souhaitiez aussi. Or notre sécurité alimentaire dépend de nos producteurs : donnez-leur les moyens de l'assurer. Ils attendent et désespèrent de trouver du sens à leur vie de labeur.
Selon la Mutualité sociale agricole (MSA), le désespoir pousse malheureusement chaque année plus de 370 agriculteurs au suicide. Pourtant, les grands groupes agro-industriels de la distribution ont vu leurs profits bondir avec la crise sanitaire. Le ruissellement que vous promettez s'entête à ne pas arriver ; il n'arrivera jamais. Sans prise en compte des coûts de production et sans application de sanctions à ceux qui ne la respectent pas, l'équilibre des relations commerciales demeurera une vaine promesse de plus. C'est pourquoi nous avons déjà proposé à plusieurs reprises la mise en place de prix planchers pour nos agriculteurs, que vous avez à chaque fois rejetés, la dernière fois dans le cadre de l'examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.