Il est essentiel de rappeler le contexte dans lequel interviendront les éventuelles réouvertures de lieux culturels puisqu'elles sont entièrement subordonnées à l'évolution de la situation sanitaire – ce qui est normal. Le Président de la République a fait le choix, fin janvier, de ne pas prendre de mesures fermes alors que leur acceptation sociale était encore forte à cette date. Le choix a ainsi été fait, à la différence d'autres pays, de laisser la courbe de contamination monter à un niveau qui ne laisse aujourd'hui à la France qu'une marge de manœuvre très étroite. C'est dans ce contexte, sans visibilité réelle, que le Gouvernement envisage donc une réouverture des lieux culturels autour du 19 mai, avec une stratégie de reprise de trois phases.
Dans les faits, les concerts et les festivals ne pourront pas redémarrer dès le 19 mai. La stratégie de reprise, qui ne peut qu'être progressive, ne concerne en effet que des jauges assises, ce qui ne conviendra pas à certains types de concerts ou de festivals. La phase 1 proposée à ce jour n'est pas réalisable pour une grande partie des acteurs du fait de la territorialisation et du maintien du couvre-feu à 19 heures, sans possibilité d'horodatage. Ce système avait pourtant l'avantage, sur le plan sanitaire, d'espacer les flux.
Il en va de même pour les salles de théâtres privés, pour lesquels la phase 1 est trop peu rentable. L'expérimentation d'un concert test réunissant 5 000 personnes debout n'aura lieu que le 29 mai prochain. Vous n'avez pas été très claire, madame la ministre, quant au financement de cette expérimentation, notamment de son volet scientifique. Je vous repose donc la question.
Des moyens importants ont été affectés pendant la crise au secteur culturel, ce qu'il faut saluer, mais face aux incertitudes qui demeurent et aux restrictions apportées à l'accompagnement financier des acteurs – mon collègue Christophe Naegelen n'a pas non plus obtenu de réponse à sa question sur ce point –, qu'est-il prévu pour assurer la relance du secteur au mois de mai et au-delà ? La réouverture annoncée ne rime en rien avec le retour à l'équilibre économique, qui ne sera pas envisageable avant des mois.
Comme vous le savez, la situation est également catastrophique pour les auteurs, qui n'ont pas d'autre revenu que les droits de leurs œuvres. Enfin, l'idée d'un pass sanitaire pour accéder aux lieux culturels fait son chemin au Gouvernement et vous nous en avez dit un peu plus ce soir. Toutefois, après que la culture a été classée comme une activité non essentielle, vous choisissez de nouveau de la marginaliser au motif que les lieux culturels présentent des risques du point de vue de la circulation du virus. Cet argument peut s'entendre, mais de nombreuses autres activités font courir un risque similaire. Pourquoi évoquez-vous la circulation du virus et les risques sanitaires pour les lieux culturels et non pour d'autres activités ? Telle est la question à laquelle vous devez absolument répondre pour éviter que le secteur de la culture ne se sente stigmatisé par rapport à d'autres.