…on parle souvent de l'Europe, mais il est des rendez-vous qu'il ne faudrait pas manquer, puisque l'on y parle d'éléments majeurs de la vie politique et de la vie de notre pays depuis plus de soixante ans. Je regrette donc que ceux qui nous parlent sans arrêt de la défense de l'agriculture et de la ruralité soient absents du débat : je le dis sans agression politicienne, mais avec conviction, car c'est pour moi un sujet important.
Le deuxième point sur lequel je souhaite insister, monsieur le ministre, et qui a déjà été évoqué par les intervenants m'ayant précédé, est la multiplicité des crises. Dans mon territoire de la Beauce, où l'on cultive la betterave, je peux vous assurer que les restructurations, ce n'est pas un petit sujet ! Les néonicotinoïdes n'ont pas non plus été une petite aventure – et je vois que Stéphane Travert hoche la tête. Je pourrais également vous parler des inondations, ou du dogmatisme avec lequel certains – qui siégeaient au banc à votre place il y a quelques années – ont abordé le sujet des retenues collinaires : je leur avais fait remarquer qu'il fallait en créer, et aujourd'hui, nous n'en disposons toujours pas. Pourtant, ce sont les mêmes qui nous disent que demain, l'utilisation de l'eau dans les exploitations agricoles devra être toujours plus surveillée.
Mais alors que nous abordons la dernière ligne droite, il faut lever les interrogations qui demeurent. Tout d'abord, pour avoir la chance de piloter un village de start-up pour l'agriculture, je peux vous assurer que des innovations absolument exceptionnelles, en particulier dans le domaine du numérique, sont imaginées et conçues par des hommes et des femmes qui savent se remettre en cause à tout moment, et que ces innovations offrent des marges de progression extraordinaires. C'est une des fiertés de notre pays.
Par ailleurs, s'agissant des contrôles du respect des dispositions dans les États membres, sur lesquels vous êtes en discussion avec vos collègues, il faut être certain, monsieur le ministre, qu'ils seront appliqués partout de la même façon. Cela vous a déjà été rappelé par un précédent orateur, mais je le répète d'autant plus volontiers qu'il y a quelques années, alors que j'étais rapporteur spécial des crédits dédiés à la sécurité alimentaire, j'avais fait ouvrir quelques conteneurs au Havre, ce qui m'avait permis de constater que les productions venues de certains pays européens n'étaient pas tout à fait conformes à ce que l'on pouvait en attendre. Il faut donc vraiment s'assurer de l'application des contrôles.
S'agissant des jeunes agriculteurs, de nouvelles modalités permettront-elles des indemnisations à l'hectare, et non pas à l'actif ? C'est un élément extraordinairement important, car la présence de fermes toujours plus grandes au détriment de fermes « à façon » est une perte de substance pour notre agriculture, et je tenais à le souligner. Il faudra également donner leur place aux fameux écorégimes, auxquels des programmes environnementaux sont naturellement adossés, et rendre compte sans dogmatisme, monsieur le ministre, des importantes difficultés rencontrées par certains domaines de grandes cultures.
Enfin, je ne peux pas terminer mon propos sans rappeler qu'il faut faire appel aux territoires : vous avez lancé des programmes ambitieux, les projets alimentaires territoriaux, et nous verrons quelles collectivités jouent le jeu. Quel sera le rôle des régions ? Elles gèrent les fonds européens et sont capables de créer des projets de filières agricoles très structurées : elles sont donc un levier considérable. Ces enjeux sont devant nous, et vous pouvez être assuré, monsieur le ministre, de notre solidarité : ensemble, nous devons rassurer les agriculteurs sur ce métier formidable, régénérer son attractivité pour les jeunes et éviter la concrétisation des conclusions d'AgroParisTech, si réservées sur les objectifs environnementaux fixés. J'imagine que vous saurez lever les obstacles.