Depuis 1965, chaque campagne présidentielle est précédée de la période de collecte des signatures. Ce système de filtrage doit être habilement proportionné pour permettre à un nombre suffisant de candidats de se présenter et de représenter le plus large courant d'opinions traversant le pays. La proposition de loi organique reprend une proposition de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique présidée par Lionel Jospin : une procédure de parrainage citoyen pour la candidature à l'élection présidentielle en parallèle de la procédure de parrainage par les élus. Le seuil de 150 000 citoyens est intéressant par certains aspects.
Ces dernières années, le sentiment de défiance à l'égard des élus et, plus globalement, des élites et des institutions, s'est accru de façon inquiétante : abstention massive, gilets jaunes, contestation de l'autorité, etc. La procédure des parrainages citoyens permettrait d'impliquer davantage les citoyens et pourrait aussi améliorer la participation à l'élection présidentielle. Ce serait une façon, sinon de réenchanter la politique – ne soyons pas naïfs –, du moins de faire en sorte qu'on s'y intéresse un peu plus.
Le système actuel de parrainage par les élus est un frein pour les personnalités politiques qui se situent en dehors des partis. Je pense à Jean Lassalle, représentant du milieu rural, défenseur de son cadre de vie : sa candidature dit quelque chose de notre pays, mais il lui est difficile de rassembler les 500 parrainages d'élus locaux. Cette procédure citoyenne permettrait de donner une expression plus large à l'ensemble du spectre politique.
Enfin, elle pourrait constituer un petit pas vers davantage de démocratie participative – le temps de l'élection durerait plus longtemps – et contribuer à la politisation des citoyens et à leur sensibilisation à la chose publique.
Toutefois, le groupe Libertés et territoires nourrit certaines inquiétudes quant au déroulement de la procédure et à ses implications éventuelles dans notre société du spectacle et du buzz permanent.
Tout d'abord, ce dispositif de parrainage citoyen semble difficile à encadrer. Nous nous interrogeons sur le risque d'achat de parrainages ou de pression sur les électeurs pour en obtenir. Ce système risque aussi de donner une prime aux candidats ou aux personnalités médiatiques déjà connus et bien implantés, au détriment de courants politiques qui n'auraient pas accès à cette exposition médiatique. Je pense évidemment aux courants régionalistes. En effet, les médias et le système politique sont très centralisés, leurs préoccupations concernent souvent Paris plutôt que les périphéries.