Si j'ajoute les étrangers, ce sont près de 90 % des habitants de ma circonscription, soit neuf personnes sur dix que je croise dans la rue, qui n'ont pas voté pour le député qui les représente. Cela s'applique à moi comme cela s'applique à vous. Il y a là un problème de fond, que nous ne devons pas banaliser, sous peine de creuser le fossé entre les citoyens et les députés. Pour bien des gens, les députés de l'Assemblée nationale parlent beaucoup, mais ne représentent personne. Dans leur grande majorité, les Français n'ont pas soutenu le député de leur circonscription.
C'est précisément le problème auquel nous entendons remédier avec cette proposition de loi. Le sujet n'est pas nouveau, les failles du scrutin majoritaire ayant été identifiées dès le XIX
Notre pays fait figure d'exception. Il est le seul à recourir au scrutin uninominal majoritaire malgré tous les biais que je viens d'illustrer. Tout cela n'est pas nouveau, et la critique du système existant a déjà été exposée à l'occasion de divers débats parlementaires. Je pense en particulier à celui de 1875 au cours duquel le député républicain de la Seine, Charles Pernolet, avait présenté une proposition de loi en faveur du scrutin proportionnel afin d'assurer une meilleure représentativité des représentants de la nation.
Avant la première guerre mondiale, il existait même un large consensus transpartisan dans notre pays en faveur de la représentation proportionnelle. Jusqu'en 1986, la France a recouru à seulement deux reprises à ce mode de scrutin. Au cours des soixante-dix ans qu'a duré la III
Contrairement aux arguments qui ont été avancés en commission des lois, l'instabilité d'un régime politique ne saurait s'expliquer par ce type de scrutin. Pour ne donner qu'un exemple, entre 1928 et 1940, bien que le système proportionnel n'ait plus été appliqué, vingt-huit gouvernements se sont succédé. À l'inverse, à une période où le scrutin proportionnel était appliqué, aucune instabilité particulière n'a été constatée.
Sous la V
Si la proportionnelle avait été mise en place en 2017, le résultat des élections législatives aurait été différent, sans occasionner pour autant une trop grande dispersion de l'offre électorale. Toutefois, le groupe majoritaire n'aurait pas obtenu tout seul la majorité. Il n'aurait bénéficié que d'une majorité relative, ce qui l'aurait obligé à forger des accords et des consensus avec des partis politiques de sensibilités différentes – ce qui n'aurait pas été plus mal du point de vue du fonctionnement démocratique de la France. L'ultra-concentration du pouvoir sur le parti majoritaire, à savoir celui du candidat élu à l'élection présidentielle, n'est pas un phénomène anodin : elle participe de l'épuisement civique auquel nous assistons aujourd'hui, alimente l'abstention et nourrit le sentiment de rejet d'un grand nombre d'électeurs, qui ne se sentent plus représentés.
Je le répète, ce débat n'est pas nouveau. En 2015, un groupe de travail sur l'avenir des institutions, coprésidé par le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone et l'historien Michel Winock, avait réfléchi à tout cela et recommandé l'instauration d'une dose de proportionnelle. De toute évidence, il est nécessaire de réformer le scrutin législatif.
Ce besoin n'a pas échappé, amis macronistes, à votre champion, aujourd'hui Président de la République, à la parole duquel vous êtes fidèles ! Dès le début de son mandat, lorsqu'il vous avait réunis au Congrès de Versailles, auquel les insoumis n'ont pas participé, il avait déclaré : « La représentativité reste […] un combat inachevé dans notre pays. Je souhaite le mener avec vous résolument. Je proposerai ainsi que le Parlement soit élu avec une dose de proportionnelle pour que toutes les sensibilités y soient justement représentées. »
Chers collègues du groupe La République en marche, où sont les macronistes « canal historique » prêts à porter la parole du Président de la République dans cette assemblée ?