Voilà maintenant plus d'un an que le monde entier et notre pays sont plongés dans cette crise sanitaire particulièrement violente, plus d'un an qu'avec responsabilité nous prenons, dans le respect de la Constitution et du droit, les mesures adéquates et proportionnées pour agir, protéger des vies, enrayer la propagation de ce virus et permettre au personnel soignant d'accomplir son travail.
Bien entendu, nous savons les efforts que cela représente pour toutes et tous, mais ils sont nécessaires. Au moment même où nous nous parlons, l'épidémie est encore une réalité quotidienne dans notre pays, même si nous entrevoyons des perspectives positives, grâce aux mesures que nous avons prises ces derniers mois, grâce au civisme des Français et grâce à la montée en puissance de la campagne vaccinale. C'est cette situation qui nous amène aujourd'hui à discuter d'un projet de loi qui vient non pas proroger une nouvelle fois l'état d'urgence sanitaire, mais proposer un cadre de sortie progressif et proportionné.
Au regard de la situation sanitaire, économique et sociale, nous tenons à saluer la décision prise par le Gouvernement de ne pas prolonger l'état d'urgence sanitaire au-delà du 1er juin et d'entrer, à partir du 2 juin et jusqu'au 31 octobre, dans une période de transition et de sortie progressive de l'état d'urgence.
Cette décision était souhaitée par nombre d'entre nous. Nous sommes en effet convaincus que, face à la durée exceptionnelle de cette crise sanitaire, nous devons mettre en place un cadre d'action adapté, qui ne soit plus celui de l'état d'urgence et nous permette de retourner progressivement mais efficacement à la vie d'avant, tout en gardant des leviers d'action justes et proportionnés. C'est ce que propose ce projet de loi. Bien entendu, plusieurs points de débat existent, et nous les discuterons au cours des heures qui viennent. J'en retiendrai cinq, que nous avons déjà abordés en commission des lois.
Le premier concerne la date de fin de cette période de transition. Si j'entends certaines propositions, je suis convaincu que nous devons maintenir la date du 31 octobre, qui est une date pertinente et raisonnable eu égard aux prévisions de la campagne vaccinale. Cette date offre par ailleurs de la lisibilité aux Français et à l'ensemble des secteurs d'activité.
Le deuxième point concerne la mise en place du pass sanitaire. Nous savions depuis plusieurs mois que nous aurions à en débattre, et nous le souhaitons. Si nous avons besoin de ce dispositif pour redémarrer l'économie, nous devons définir très clairement le périmètre des activités susceptibles d'être concernées. En l'espèce, nous traçons une ligne rouge : le pass sanitaire ne pourra jamais concerner les activités de la vie quotidienne. À cet égard, je tiens à saluer l'amendement de la présidente de la commission des lois, Yaël Braun-Pivet, que nous avons adopté en commission et qui formalise cette exigence.
Le troisième point concerne le couvre-feu qui, actuellement, ne peut être déclenché qu'en période d'état d'urgence sanitaire. Si nous comprenons le maintien de ce dispositif compte tenu de la situation sanitaire actuelle plus dégradée qu'à la même époque l'an dernier, nous saluons le fait que le dispositif soit bien limité dans le temps, puisqu'il ne pourra être appliqué au-delà du 30 juin 2021. Nous apporterons cependant une précision quant à son application à partir du 9 juin, et nous attendons des réponses précises de la part du Gouvernement concernant les modalités de contrôle afférentes, ce dispositif demeurant un dispositif exorbitant de droit commun, ce qui est grave, même pour un mois.
Le quatrième point en débat concerne l'article 2 qui donne au Gouvernement la possibilité de déclencher, pour une durée de deux mois, une période d'état d'urgence sanitaire territorialisée. Au vu des enseignements que nous pouvons tirer de l'été 2020 et de la situation sanitaire actuelle, ce dispositif nous paraît nécessaire, à condition d'être parfaitement encadré et contrôlé par le Parlement. Le Gouvernement a souhaité le rétablir, les dispositions initialement proposées n'ayant pas été validées par la commission des lois : nous le comprenons, mais le groupe La République en marche proposera, avec le rapporteur Jean-Pierre Pont, dont je tiens à saluer le travail, un compromis sur lequel nous devrions nous entendre.
Le dernier point que je retiens concerne la conservation des données. J'insiste ici sur le fait que le texte dont nous discutons aujourd'hui n'a pas pour objet de prévoir les modalités de renforcement de notre souveraineté numérique, sujet auquel nous sommes toutes et tous attachés, ni même de revoir les modalités de fonctionnement du SNDS. Nous aurons le débat dans cet hémicycle, mais tâchons de ne pas perdre de vue deux impératifs : non seulement nous ne devons pas fragiliser nos dispositifs de conservation des données sanitaires, mais nous devons également garder à l'esprit que nos chercheurs auront besoin des données issues de cette crise pour leurs travaux, qui doivent nous permettre d'en tirer tous les enseignements propres à améliorer nos politiques de soins.
Mes chers collègues, la crise sanitaire que nous vivons est unique, elle aura marqué durablement chacune et chacun d'entre nous. Nous ne l'oublierons jamais. Dans les semaines qui viennent, nous aurons l'occasion d'amorcer un retour à la vie normale : cette étape ne nous exempte cependant pas de nos responsabilités. Aussi, soyons à la hauteur.