Il faut un patron dans un groupe, même dans une coopération. Chez Airbus, pendant longtemps, le patron était français. Il ne l'est plus. Atos est un excellent exemple de coopération franco-allemande. Siemens n'a jamais été très performant en informatique, les Français sont meilleurs en la matière. Nous, Français, avons détruit un Airbus de l'informatique en 1975. Je l'ai vécu au jour le jour puisque je travaillais au Monde à l'époque – j'avais même écrit « French ordinateur ». Cela a fait la une du Monde : déjà, à l'époque, la France a choisi les États-Unis plutôt que l'Europe. Valéry Giscard d'Estaing et, son ministre, Michel d'Ornano ont rompu un accord dans lequel Siemens était partie prenante avec la Compagnie internationale de l'Informatique (CII) et Philips. C'était une très grave erreur. Du coup, nous ne sommes jamais réellement revenus dans la course et dans le secteur du matériel informatique.
Mais Atos est une espérance et Siemens, qui connaît ses faiblesses en informatique, a vendu ses activités informatiques à Atos, prenant, en contrepartie, 18 % du capital d'Atos. Sauf qu'Atos a un bon patron, Thierry Breton, qui connaît son métier. D'ailleurs, il a racheté Bull qui ne représentait plus grand-chose, mais disposait encore d'un savoir-faire et de compétences. Cela nous a permis de développer des ordinateurs quantiques. Nous venons d'en vendre un aux États-Unis. On peut donc s'appuyer sur Atos pour développer une politique industrielle, y compris avec l'Allemagne – du fait de la présence de Siemens – dans le numérique et le big data. Les exemples existent donc, mais il faut toujours un patron, un leader dans un projet. Hormis dans le cas la coopération entre Safran et General Electric pour la fabrication des moteurs CFM56 qui équipe les Airbus et les Boeing, je ne connais pas d'exemple de partage à 50-50 qui fonctionne.