N'ayant pas droit à de longs dialogues avec le ministre, je saisis chaque occasion qui m'est donnée de rappeler l'importance de la place des citoyens dans le système judiciaire français.
Nous avons débattu ce matin d'un amendement qui prévoyait d'expérimenter le recours à des jurés citoyens en dehors des assises, par exemple au tribunal de commerce ou au tribunal correctionnel. Il pourrait en effet y avoir un intérêt à ce que les citoyens s'emparent de ces thématiques, comprennent mieux le fonctionnement de la justice et participent concrètement à la prise de décision. C'est très important à nos yeux.
Nous partageons le constat dressé par le ministre : bien souvent, quand on parle de justice, on a plus affaire à une discussion de café du commerce, et les solutions proposées donnent lieu à une surenchère dont nous avons constaté l'aboutissement hier, aux abords de l'Assemblée nationale – dans des circonstances d'ailleurs problématiques, une ligne rouge ayant été allègrement franchie du point de vue du respect de la Constitution et du caractère républicain de notre régime politique et de nos institutions. Cette réflexion doit irriguer notre pensée et inspirer nos objectifs et nos propositions politiques, y compris s'agissant du fonctionnement des cours d'assises. Si elles disparaissent, que restera-t-il demain de la justice rendue au nom du peuple français ?
Certes, l'actuel garde des sceaux ne souhaite peut-être pas les supprimer. Il n'en demeure pas moins que, demain, tout sera en place pour qu'un autre ministre le fasse, au prétexte que les cours criminelles fonctionnent très bien, que les délais de jugement y sont plus courts qu'en cours d'assises et qu'il est compliqué de trouver des jurés. Il pourra alors me dire : « Ne vous inquiétez pas, le système des cours d'assises sera conservé pour les procédures en appel, mais en première instance, les cours criminelles départementales sont bien plus efficaces – regardez les chiffres ! » Je ne sais pas si je vais me porter candidat pour faire partie du prochain gouvernement de La République en marche mais, au moins, je maîtrise déjà les arguments que l'on y emploie.