Intervention de Meyer Habib

Séance en hémicycle du mardi 1er juin 2021 à 15h00
Prévention d'actes de terrorisme et renseignement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib :

Je vous le dis d'emblée, le groupe UDI et indépendants accueille favorablement le projet de loi. Ses dispositions, inscrites dans la loi en 2017 mais aussi dans le règlement au moment de la sortie de l'état d'urgence, visaient à nous doter des moyens de mieux lutter contre le terrorisme. Depuis, la crise sanitaire a frappé et a un peu détourné notre attention. Mais ne l'oublions jamais : alors qu'en avril 2020, la France était totalement à l'arrêt, confinée et tétanisée, un père de famille, qui faisait ses courses dans une boucherie, était poignardé à mort sous les yeux de son fils à Romans-sur-Isère.

Vous avez rappelé, monsieur le ministre, la triste liste des attentats, de celui de la basilique Notre-Dame à Nice à celui contre Stéphanie Monfermé, fonctionnaire de police à Rambouillet. La menace reste intacte. Depuis l'attentat contre des militaires à Montauban et contre l'école juive Ozar Hatorah à Toulouse, en 2012, notre pays a subi des dizaines d'attentats terroristes, tous islamistes : 271 morts, des milliers de blessés et des milliers de familles brisées. Avec le projet de loi, nous adopterons pour la quatrième fois une loi antiterroriste depuis le début du quinquennat, et pour la neuvième fois depuis 2012 !

Il faut nommer le mal – vous l'avez fait, monsieur le ministre. Notre pays est confronté à un phénomène massif : la radicalisation islamiste qui soutient, exalte, annonce le terrorisme et qui en est le terreau. C'est une idéologie du chaos qui glorifie la mort et corrompt les esprits au sein même de notre société.

Aucun enfant ne naît raciste, djihadiste ou terroriste mais l'islamisme transforme les individus qui ont grandi ici, qui ont fréquenté les écoles de la République, en ennemis mortels prêts à frapper et à retourner les armes contre leurs propres compatriotes. Depuis mon entrée à l'Assemblée, j'ai siégé dans la plupart des commissions d'enquête, participé à des dizaines d'heures d'auditions, effectué des dizaines de déplacements et fait des dizaines de visites dans les prisons et il me faut constater que nous sommes le plus souvent en présence d'hommes structurés idéologiquement, déterminés à mener une guerre totale contre la France. Il ne s'agit ni de fous sous l'emprise de bouffées délirantes, ni de déséquilibrés mais de soldats de l'islam radical.

Une règle doit être appliquée : s'il y a un doute, car parfois, il y en a, il doit bénéficier à nos concitoyens, seulement à eux, et non aux djihadistes, même s'ils sont repentis. Un État de droit, c'est un État qui protège avant tout ses citoyens, lorsqu'ils vont au théâtre, lorsqu'ils font leurs courses ; c'est un État qui protège ses enfants lorsqu'ils regardent, émerveillés, un feu d'artifice le jour de la fête nationale.

Les services de l'État ont utilisé les dispositifs en faisant preuve de discernement ; ils ont su les adapter face aux menaces. Pour le groupe UDI-I, tout l'enjeu porte sur leur proportionnalité aux atteintes aux libertés fondamentales qu'ils impliquent. En outre, leur pérennisation ne doit pas être synonyme de banalisation.

À titre personnel, je ne vous cache pas que j'aurais aimé que le texte aille plus loin. Plusieurs de mes amendements ont été déclarés irrecevables, ce que je regrette. Je proposais la déchéance de nationalité – au moins pour les binationaux –, l'interdiction du retour sur le territoire des individus ayant séjourné sur un terrain d'opérations terroristes, la suppression des allocations familiales, sur décision d'un juge après examen du dossier, en cas de déficience des parents d'un enfant condamné pour terrorisme. Je souhaitais aussi la création de centres de rétention administrative destinés aux terroristes les plus dangereux ayant purgé leur peine.

Cette dernière mesure est très efficace et parfaitement compatible avec l'État de droit comme l'atteste le cas d'Israël, État démocratique que je connais bien, exposé depuis sa création au terrorisme. En vingt ans, la rétention administrative a permis – écoutez bien, messieurs les ministres –, de diviser par quinze le nombre des victimes et d'éviter des milliers d'attentats. Lorsqu'un djihadiste passe à l'acte, il est déjà trop tard ; avant, le risque n'est pas toujours avéré. Je vous invite à venir visiter ma circonscription pour constater par vous-mêmes l'efficacité d'Israël dans la lutte contre le terrorisme.

Chers collègues, face à ce défi existentiel, une République de combat s'impose. Concernant le volet terroriste, notre groupe a formulé plusieurs propositions de bon sens pour compléter le projet de loi : possibilité de procéder à la fouille d'un véhicule sans le consentement du conducteur, fermeture automatique des annexes des lieux de culte fermés, interdiction pour une personne condamnée d'administrer et de diriger une association cultuelle, etc.

Pour le groupe UDI-I, le volet consacré au renseignement couvre un champ extrêmement technique dont la portée tend à s'accroître à mesure que l'on avance dans le projet de loi. Cette partie du texte requiert donc, et je vais vite, une vigilance accrue afin de s'assurer que les dispositifs instaurés font l'objet d'un encadrement strict empêchant tout dévoiement de leur utilisation. Les techniques algorithmiques posent question, de même que la durée de la conservation des données ; le contrôle exercé par la CNCTR n'est pas assez poussé ; certaines techniques ou échanges d'informations nécessiteraient, à notre sens, un avis conforme.

Nous serons donc très attentifs aux débats sur tous ces sujets, ainsi qu'à l'accueil qui sera réservé à nos amendements.

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