La GPA semble s'être invitée dans nos débats, alors qu'elle ne figure pas dans le texte qui, dans sa version initiale présentée par le Gouvernement, ne portait que sur l'ouverture de l'AMP à toutes les femmes et sur les conséquences à en tirer en matière de filiation.
Elle s'y est invitée notamment, à l'initiative de certains membres de cette assemblée qui souhaitaient l'établissement d'une double filiation, ce que je peux entendre au titre de l'intérêt de l'enfant – aucune hypocrisie donc, en l'espèce.
Elle s'est également invitée dans nos débats à la suite des signaux envoyés par la Cour de cassation, laquelle a, depuis que nous avons commencé l'examen de ce texte, rendu deux arrêts nous poussant à adopter une position claire, chose que nous faisons, afin de mettre un terme aux disparités que nous connaissons : selon les territoires, chaque tribunal pouvait adopter sur les questions de filiation des positions différentes.
Pour ce qui me concerne, je suis en profond désaccord avec vous, madame Genevard, lorsque vous considérez qu'il faut priver un enfant de sa double filiation parce que ses parents ont commis un acte qui n'est pas reconnu par notre droit. Nous ne sommes pas dans une tragédie grecque, où les crimes des parents pèsent sur les générations suivantes : je vous laisse imaginer la catastrophe que constituerait en droit pénal une telle conception de la responsabilité, totalement opposée aux principes qui régissent notre droit.
Quant à la CEDH, elle nous dit, dans la décision du 18 mai 2021 que vous avez citée, deux choses fort intéressantes, qui sont d'ailleurs un bel exemple de citation horizontale entre cour et assemblée : d'abord, en tant qu'État membre, nous avons l'obligation de donner une filiation à deux branches à l'enfant issu d'une GPA, peu importe que notre droit autorise ou non cette dernière ; l'enfant, lui, a droit à l'établissement plein et entier de sa filiation. Sur ce point, la CEDH est constante, tout comme la Cour de cassation.
Ensuite, – et c'est sur ce point que je suis en désaccord avec vous, monsieur Touraine – la CEDH n'impose pas que la filiation pleine et entière qui lie l'enfant au second parent, c'est-à-dire au parent avec lequel il n'a pas de lien biologique, soit une filiation d'intention : elle laisse aux États la possibilité de choisir, en fonction de leur cadre juridique, si la filiation résulte d'une adoption ou si relève du titre VII du code civil.
Or la solution que nous souhaitons retenir est celle défendue par Mme Limon dans sa proposition de loi, à savoir une adoption facilitée et accélérée, afin d'éviter à ces enfants de se retrouver dans des situations inacceptables, telles que nous en avons connues par le passé.
Je sais, monsieur le garde des sceaux, que vous avez pris des engagements au sujet de cette proposition de loi ainsi, comme l'avait fait votre prédécesseure, qu'au sujet d'une circulaire devant faciliter les procédures auprès des agents consulaires et des tribunaux.