Intervention de Philippe Berta

Séance en hémicycle du mercredi 9 juin 2021 à 21h30
Bioéthique — Article 17

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Berta, rapporteur de la commission spéciale :

Il me sera difficile de répondre à la totalité des arguments, puisqu'on aboutit aux FIV à trois parents… Je vais essayer de débroussailler.

Tout d'abord, la Cour de justice de l'Union européenne a effectivement établi, par son arrêt Brüstle contre Greenpeace de 2011, qu'il ne faut surtout pas confondre les embryoïdes avec les embryons, laissant les différents pays européens libres de leurs choix bioéthiques.

Vous proposez de supprimer l'article 17, ce qui aurait pour conséquence d'empêcher différentes choses, à commencer par la possibilité de l'adjonction de cellules humaines à des embryons animaux. Or, de telles recherches présentent un véritable intérêt pour la recherche et font actuellement l'objet d'un flou juridique, que l'article 17 a pour vertu de combler, répondant ainsi à une demande du Conseil d'État.

L'article 17 vise à sécuriser les recherches portant sur l'embryon animal, tout en maintenant l'interdit portant sur les chimères humain-animal.

Pourquoi avons-nous besoin de ces recherches ? Le rôle des scientifiques est de faire progresser le champ des connaissances et le champ des thérapies. Les recherches sur les chimères animal-homme sont extrêmement prometteuses. Certaines expériences pourraient permettre d'importants progrès, comme celles conduites sur les cellules pancréatiques chez la souris, pour progresser dans la lutte contre le diabète, ou encore sur la production de cœurs humanisés chez le porc, pour résoudre les problématiques de pénuries de greffons.

Bien sûr, cette question est particulièrement sensible pour les recherches visant à créer des blastocystes interespèces, dans le but de produire des tissus et des organes pour d'éventuelles transplantations. Il s'agit d'un champ où les normes éthiques ont une importance particulière, et elles sont d'ailleurs déjà définies et appliquées par la communauté scientifique. Mais il s'agit aussi d'un champ porteur d'espoirs thérapeutiques très importants, qu'il ne faut sans doute pas totalement exclure pour notre avenir, et surtout pour l'avenir des malades.

Deuxièmement, la possibilité est ouverte de recourir aux techniques de modification ciblée du génome des embryons humains faisant l'objet d'une recherche. Il est bien sûr totalement rigoureusement interdit dans notre pays, fort heureusement, de faire des modifications génétiques sur les embryons à réimplanter.

Si l'on utilise des embryons porteurs de mutations en culture in vitro, c'est pour comprendre l'impact de la mutation et ce qu'elle induit à un stade précoce de développement, aboutissant par exemple à l'échec d'un développement.

La rédaction de l'article 17 permet donc de sécuriser ces recherches, dans un cadre in vitro : hors de question bien sûr de reproduire le modèle chinois, que nous avons évoqué cet après-midi. L'édition du génome – cette fameuse technique CRISPR-CAS9 ou ses dérivés – présente un intérêt scientifique majeur. Elle concerne, je le redis, les embryons non implantables dans l'utérus et destinés à la destruction. Cette évolution permettrait aux chercheurs français de prendre part au développement de nouvelles thérapies et de rester dans le concert international, car la concurrence, faites-moi confiance, fait rage.

Nous devons revitaliser le domaine de la recherche en France ; nous possédons de nombreuses compétences, malheureusement insuffisamment valorisées. Dès lors, j'émets un avis défavorable à l'ensemble de ces amendements de suppression.

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