Intervention de Bastien Lachaud

Séance en hémicycle du jeudi 17 juin 2021 à 21h30
Réparation des conséquences des essais nucléaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBastien Lachaud :

Cette proposition de loi vise à réduire les injustices persistantes que subissent des dizaines de milliers de victimes des conséquences des essais nucléaires réalisés en Polynésie et en Algérie, en traitant des conséquences de ces essais sur les personnes et sur l'environnement.

Sur les 150 000 personnes civiles et militaires ayant participé de près ou de loin aux 210 essais français conduits au Sahara algérien et en Polynésie entre 1960 et 1996, seule une poignée a obtenu une indemnisation. Certes, des progrès ont été réalisés avec la loi Morin de 2010 qui a créé le CIVEN, chargé de l'indemnisation des victimes civiles et militaires des conséquences des essais nucléaires. Mais, comme l'a révélé l'enquête de l'ONG Disclose en mars dernier, le CIVEN n'est pas à la hauteur des enjeux : c'est un euphémisme.

Dans les faits, ce comité s'est érigé en mur infranchissable. Il rejette massivement les demandes d'indemnisation, en ne motivant que rarement ses décisions et sans rendre publics ses avis. Cela aboutit à des situations absurdes où deux cas identiques peuvent recevoir des réponses opposées. Pire : pour légitimer son action face aux critiques, le CIVEN a menti sur la question décisive de la mesure des taux de radioactivité reçus par les populations. Le comité a prétendu que ses calculs avaient été validés en 2010 par l'Agence internationale de l'énergie atomique, une référence en la matière. L'enquête de Disclose a démontré que c'est faux : les scientifiques mandatés par l'AIEA n'ont jamais eu accès aux données sources, toujours classées secret défense à l'époque. Ils n'ont donc pu que vérifier des calculs sur la base de données très parcellaires, et souvent fausses.

De la sorte, jusqu'en 2019, le nombre de civils polynésiens – c'est-à-dire hors militaires et prestataires d'entreprises – s'étant vu proposer une offre d'indemnisation s'élève à soixante-trois. Les améliorations apportées par la loi EROM en 2017 ne concernent que les requêtes présentées par des vétérans de l'armée et des agents du Commissariat à l'énergie atomique.

Les conséquences environnementales des essais nucléaires en Polynésie sont, quant à elles, ignorées des dispositifs actuels. On sait pourtant que des failles causées par les essais sont apparues dans les zones où sont stockés les déchets radioactifs. Un grand plan de dépollution et de traitement des déchets nucléaires est urgent en Polynésie.

Une opacité plus grande encore règne sur les dix-sept essais menés en Algérie entre 1960 et 1967. Dans le contexte de la fin de la guerre, les deux parties n'ont pas négocié de clause qui aurait contraint la France à décontaminer les sites pollués. Ces derniers, dont la localisation est souvent secrète, ne font l'objet d'aucun contrôle radiologique, ni d'actions de sensibilisation auprès des populations sur les risques sanitaires. Sur ce point, la présente proposition de loi ne peut aller au-delà de l'exposé des motifs, puisque, contrairement à l'Algérie, la France n'est pas signataire du traité sur l'interdiction des armes nucléaires…

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