Madame la ministre, que reste-t-il de la reconnaissance promise aux travailleuses et aux travailleurs de la première, mais aussi de la seconde ligne, celles et ceux que nous applaudissions pour avoir tenu le pays debout ? Lorsque beaucoup étaient cloîtrés à la maison, ils prenaient, eux, le risque de tenir les caisses des supermarchés, d'achalander les rayons, de donner des cours aux enfants, de conduire les bus, de livrer les marchandises, de fabriquer le pain.
Certains, dans votre majorité, faisaient mine de découvrir que les bas salaires étaient paradoxalement souvent réservés à celles et ceux dont l'activité était tout à fait essentielle au pays et à nos vies. Avec la passion des nouveaux convertis, des voix s'élevèrent, même dans la majorité, pour convenir qu'il faudrait bien trouver le moyen de reconnaître enfin l'utilité sociale de ces métiers.
Plus d'un an après, que voyons-nous ? Rien, à peu près. Parce que, disons-le, votre prime de 1 000 euros ne répond en rien aux besoins des salariés. Exceptionnelle, elle ne s'inscrit pas dans une reconnaissance durable de leur contribution. Optionnelle, elle dépend du bon vouloir des entreprises et risque de passer sous le nez du plus grand nombre. Défiscalisée et surtout exonérée de cotisations, elle ne contribue pas aux comptes sociaux, alors que le besoin est grand de s'assurer que la création de richesses contribue à les équilibrer.
Madame la ministre, il y a des tabous qu'il faudra bien lever un jour ou l'autre, au premier chef celui des salaires. Abandonnez-vous le dogme d'une économie de l'offre, qui fait du salaire un problème alors qu'il est la solution, y compris à tout ce que vous avez expliqué depuis tout à l'heure ? Convoquez les partenaires sociaux dans le cadre d'une conférence sociale pour relever significativement les bas salaires ; vous savez que c'est une des réponses et une solution aux problèmes dont nous débattons aujourd'hui. Vous contribuerez à fiabiliser la possibilité d'une reprise tant attendue par l'ensemble des acteurs économiques, vous abonderez les comptes sociaux pour consolider les amortisseurs dont nous avons tant besoin et surtout, vous ferez œuvre de justice sociale.