Intervention de Jean-Paul Lecoq

Séance en hémicycle du vendredi 18 juin 2021 à 15h00
Externalisation des services publics — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Voilà que les masques sont tombés sous Emmanuel Macron. Telle est la véritable nouveauté.

Au reste, l'apparition d'une entreprise américaine au cœur de l'exécutif pose une série de problèmes. Qu'en est-il de la confidentialité, de la protection et de la sécurité de l'État ? Pourquoi la haute fonction publique ne serait-elle pas en mesure de faire ce genre d'études ? Comment en est-on arrivé à un tel appauvrissement ? Au vu du bazar sans nom de la stratégie vaccinale, a-t-on prévu le remboursement de cette prestation ?

Car sur la stratégie sanitaire, il a été démontré au grand jour qu'en raison de l'appauvrissement délibéré de la réflexion politique, la gestion des stocks de masques, la stratégie vaccinale, l'élaboration de l'application numérique anti-covid ont été autant d'échecs retentissants. Et que dire de l'état de l'hôpital public ! La crise n'a été surmontée que grâce aux efforts titanesques de soignants qui avaient l'intérêt général chevillé au corps : tels sont, aussi, les fonctionnaires. En décembre dernier, le magazine « Cash Investigation » a d'ailleurs mis en évidence que la baisse effective des dépenses des hôpitaux s'était faite au détriment de la qualité des prestations, par l'augmentation des cadences ou suite à la détérioration du matériel utilisé.

Comment expliquer que le service de prise de rendez-vous pour la vaccination contre la covid-19 ait été confié à une plateforme privée ? Comment expliquer que l'ensemble des graphiques et des données présentées par le ministère de la santé proviennent d'un site internet qu'un ingénieur a créé pendant son temps libre après avoir constaté l'absence d'outil adéquat ? Le collectif Nos services publics chiffre l'ampleur des transferts à un minimum de 160 milliards d'euros, soit près de la moitié du budget de l'État. Tel est également l'enseignement qu'il faut tirer de cette obsession dogmatique : l'État a mis en place, depuis vingt ans, un carcan visant à obliger tout le monde à utiliser de tels modes d'action.

Les règles juridiques, comptables et budgétaires ont limité progressivement la possibilité d'embaucher des fonctionnaires, tout en ouvrant au maximum le recours à la sous-traitance. La coupable est évidemment la LOLF, puisqu'elle interdit légalement l'augmentation des dépenses de personnel. Ainsi, lorsque l'on a besoin d'embaucher, il est interdit de recruter des fonctionnaires mais il est autorisé de faire appel à un prestataire extérieur, car les crédits budgétaires permettant de le payer ne sont pas interdits, eux.

Un membre du collectif Nos services publics a indiqué avoir remarqué au cours d'un contrôle qu'une agence de l'État était dotée de 120 fonctionnaires pour un budget en ressources humaines de 15 millions d'euros. Cependant, étant en sous-effectif et ne pouvant recruter en raison du plafonnement des dépenses de personnel prévu par la LOLF, elle faisait appel à 60 prestataires en continu, pour un budget de 15 millions d'euros : les prestataires coûtaient donc deux fois plus cher ! Ainsi, en raison de la LOLF, l'agence était obligée de payer deux fois plus cher un prestataire privé plutôt que de recruter des fonctionnaires.

Ne pas se pencher sur les abus en arguant de la « rationalité des dépenses » relève soit du dogmatisme, soit de la bêtise – je retiendrai le dogmatisme.

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