Intervention de Dominique Potier

Séance en hémicycle du jeudi 24 juin 2021 à 15h00
Rémunération des agriculteurs — Article 2 bis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Monsieur le président, je vous répondrai que l'objectif d'une telle prise de parole liminaire est d'aller plus vite au moment de soutenir les quatre ou cinq amendements que l'on a déposés sur l'article en cause…

Nous avons bien saisi le concept du rémunérascore souhaité par Célia de Lavergne : cependant, comme je l'ai dit au cours de la discussion générale, il se trouve en décalage avec les possibilités actuelles. Je reprends l'esprit de la loi PACTE et de l'impact score que souhaitaient le MOUVES et, plus généralement, les acteurs de l'économie sociale : au-delà du produit même, on sait aujourd'hui évaluer la capacité de l'entreprise à partager la valeur. Graziella Melchior et moi-même avons remis à la commission des affaires économiques, en décembre 2020, un rapport d'information consacré à ces questions. Nous disposons d'instruments qui permettraient des mesures beaucoup plus intelligentes.

Encore une fois, je ne vais pas répéter mes propos de ce matin, mais se limiter à distinguer la part des producteurs de celle des transformateurs et distributeurs témoigne d'une vision pour le moins erronée. Je n'enfreins pas un tabou en affirmant que, dans le monde agricole, les écarts de revenu sont d'une amplitude extraordinaire ; j'aurais du reste aimé que cette diversité, qui concerne aussi les conditions de travail, soit mieux prise en compte lors des négociations concernant la PAC et le plan stratégique national qui en découle. Il faudrait être un démagogue pour défendre une corporation en bloc, sans souci de la réalité !

Et puis l'on trouve, dans le monde salarié agricole et parmi les salariés de l'agroalimentaire, des situations qui ont été décrites à l'envi par nos collègues. Le recours au travail détaché, au travers d'agences d'intérim, ne concerne pas uniquement les abattoirs : il concerne aussi les postes des caissières, des préparateurs de rayons et des employés qui chargent les camions ou qui les conduisent. Tous sont payés en deçà du revenu médian, tout en ayant des horaires de travail atypiques.

J'aimerais qu'à l'avenir, lors de l'achat d'un produit, on puisse se dire que la part du capital est juste et que celle du travail permet d'avoir des écarts de revenus qui reconnaissent le travail de chacun, à toutes les étapes de la production, de la fourche à la fourchette. Ce n'est pas hors de portée. Et si l'on doit mettre en place un rémunérascore, qu'il conviendrait de baptiser autrement – score d'impact social et environnemental, par exemple –, il ne faut pas opposer les producteurs aux autres acteurs : ce serait faire fi de la réalité qui est devant nous, dans nos territoires, toute aussi importante que le monde agricole, même si elle n'est pas aussi bien représentée que lui. Nous avons le devoir moral d'en tenir compte.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.