Intervention de Pierre-Yves Bournazel

Séance en hémicycle du lundi 28 juin 2021 à 16h00
Respect des principes de la république — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Yves Bournazel :

Le 11 mars 1882, lors d'une conférence à la Sorbonne restée célèbre, l'historien Ernest Renan a tenté de répondre à la difficile question : « Qu'est-ce qu'une nation ? ». « Une nation, nous dit-il, est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs ; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis. » Cette définition de Renan éclaire de façon lumineuse le but visé par le présent projet de loi : protéger les principes de la République qui structurent notre nation. Il s'agit bien de favoriser le désir de vivre ensemble, tout en donnant à la République la force de se défendre contre ses ennemis.

L'émergence d'un « archipel français » que décrit Jérôme Fourquet est inquiétante ; elle ne date pas d'hier, ni même d'avant-hier, mais puise ses racines dans une multitude de petits renoncements accumulés ces trente dernières années. Le défi de réparer ces failles est immense, et une seule loi n'y suffira pas. C'est un défi collectif pour les dix ou vingt prochaines années, qui demande de dépasser les clivages politiques et de se rassembler dans l'intérêt général. C'est le défi d'une génération.

Par ce projet de loi, le Gouvernement et la majorité présidentielle poursuivent, avec une détermination sans faille, l'objectif de rassembler et de fédérer autour de l'unité de la République. Au cœur de la République, il y a la laïcité – précisément parce que la laïcité possède cette vertu qui nous permet de vivre ensemble. Notre vision de la laïcité s'inscrit dans la philosophie d'Aristide Briand, lorsqu'il affirme que la loi de 1905 accorde aux citoyens la pleine liberté d'exercer leur culte, sans autre limite que le respect de l'ordre public. Elle demande de pratiquer sans cesse le sens de l'équilibre, d'avoir le courage de la nuance et de ne pas céder à l'exacerbation du débat public.

Cet effort, nous l'avons exercé collectivement lors de la première lecture du projet de loi en séance et de la deuxième lecture en commission spéciale. Après l'examen au Sénat, les trois groupes de la majorité présidentielle ont travaillé de façon constructive afin de rétablir l'équilibre du texte. Le groupe Agir ensemble se réjouit du retour de certains articles à leur version d'origine, tels qu'ils avaient été débattus et votés par l'Assemblée – je pense notamment au dispositif introduisant une journée pédagogique de la citoyenneté pour les enfants instruits en famille, et à la sensibilisation renforcée des élèves au bon usage des outils numériques et des réseaux sociaux. À l'aube de son examen en deuxième lecture dans l'hémicycle, le texte nous semble équilibré et abouti. Il renforce notre arsenal législatif afin de lutter contre toutes les tentatives de séparatisme, et permet à la République de réagir dans le cadre de l'État de droit.

Nous défendrons un seul et unique amendement, en commun avec les groupes de la majorité présidentielle, mais aussi avec Les Républicains – c'est à souligner, car c'est un signe de responsabilité : il a pour objet d'aggraver la peine encourue dans le cadre du délit créé par l'article 18, lorsque les faits sont commis au préjudice d'une personne particulièrement vulnérable en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique, ou encore d'un état de grossesse. Son adoption permettra de protéger davantage les personnes les plus fragiles.

Mes chers collègues, nous ne sommes pas d'accord sur tout – c'est bien heureux –, mais comment ne pourrions-nous pas nous retrouver sur l'essentiel : le renforcement des principes de la République ? Sachons dépasser les clivages partisans et stériles ; dans la diversité de nos légitimes sensibilités, il est des moments où il faut se rassembler avec force dans l'intérêt général.

Ce texte ne se réduit pas à un projet de loi contre les ennemis de la République : il s'inscrit dans une vision positive, tendue vers le commun que désire produire notre nation ; il épouse une vision ouverte de la société qui refuse les amalgames faciles et les entraves aux libertés fondamentales, et qui rejette toute compromission avec ceux qui défient la République et ses principes. Forts de cette vision positive de la société, le Gouvernement et la majorité ont placé l'égalité des chances au cœur de leurs réformes : c'est ainsi que la priorité a été donnée à l'acquisition des fondamentaux à l'école, et que les classes de CP et de CE1 ont été dédoublées en zone d'éducation prioritaire, pour ceux qui, au départ, ont moins de capital social et culturel. Voilà ce que nous faisons depuis quatre ans – c'est, je le disais, le défi d'une génération. Notre vision inclusive de la société fait également du service civique un formidable levier pour favoriser l'engagement de tous les jeunes de moins de 25 ans dans une mission d'intérêt général. Voilà la concrétisation du respect des principes républicains, que nous défendons avec force et conviction depuis quatre ans. Notre groupe est fier de soutenir, dans le cadre de la majorité présidentielle, un texte de liberté, de combat, de protection et d'équilibre. Le débat va maintenant commencer.

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