Je voudrais m'attarder sur deux points. Pour commencer, l'importance du volume des crédits annulés. Mais peut-on vraiment reprocher au Gouvernement de tirer les conséquences d'un budget dont, de l'avis même de la Cour des comptes, de nombreuses missions ont été clairement sous-budgétisées dans des proportions impressionnantes ? Ce qui est préoccupant, ce sont précisément ces sous-dotations. Nous verrons ultérieurement si d'autres annulations seront décidées, dans quelles proportions on jouera sur les reports ; en tout état de cause, nous sommes vraiment dans une situation d'urgence et il faut bien y faire face.
La seconde observation, formulée notamment par nos collègues du groupe Les Républicains, consiste à dire qu'il faut une loi de finances rectificative. Je comprends très bien ce point de vue : ce serait en effet beaucoup plus propre en apparence. Mais je comprends très bien aussi le Gouvernement. Une loi de finances rectificative porte sur des ressources et des dépenses. Sur les dépenses, M. Darmanin est fondé à dire que, si nous voulons réaliser des économies importantes, structurelles, nous avons besoin de temps, le temps de remettre en cause l'organisation de certaines politiques publiques, et cela n'est pas possible dans le temps court d'une loi de finances rectificative. Dès lors, la tentation serait, et je comprends que le Gouvernement ne le souhaite pas, d'augmenter les impôts pour se dégager un complément de ressources. L'instrument choisi au final n'est peut-être pas pleinement satisfaisant mais, dans les circonstances, il n'y avait pas d'autre solution.
En revanche, je crois comme Charles de Courson que le problème le plus important est celui des annulations de crédits pour les armées. Le président de notre commission s'est exprimé ce matin à ce sujet, mais je considère qu'il l'a fait de façon insuffisante. En effet, je trouve extrêmement choquant que, prétextant des obligations sur le terrain, la ministre des armées, Mme Parly, ne soit pas venue expliquer ici une mesure aussi importante. Nous nous retrouvons dans cette situation extraordinaire où les chefs militaires ne sont pas venus parce qu'ils sont en désaccord avec l'autorité ministérielle et ne souhaitent pas défendre la politique du Gouvernement, et où le Gouvernement lui-même n'est pas venu défendre sa politique ! Je crois qu'il faut clairement marquer la désapprobation très profonde de notre commission, qui se sent mise en cause dans sa dignité par la désinvolture dont on fait preuve sur ce point.